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Laurence élève seule sa fille de 6 ans: ““Mieux vaut être seule que mal accompagnée””

Aujourd’hui, c’est la Journée internationale des droits de la femme ! Et bien que nous célébrions les femmes tous les jours chez Flair, nous le faisons deux fois plus en cette date symbolique. À cette occasion, nos journalistes sont heureuses de mettre à l’honneur des femmes qui les inspirent au quotidien.

Herlinde a tout de suite pensé à interviewer une de ses amies. Laurence, 33 ans, a donné naissance à sa fille Mila il y a six ans. Peu de temps après la naissance, elle s’est séparée du papa et s’est soudainement retrouvée seule pour s’occuper de son bébé. “Quand j’ai appris que j’étais enceinte, j’ai vraiment eu peur de ne pas pouvoir envisager d’avenir avec mon compagnon de l’époque. J’ai même brièvement envisagé d’interrompre la grossesse, mais j’ai senti que ce n’était pas ce que je voulais au fond de moi. Je savais que je pouvais offrir un foyer aimant à mon bébé, avec ou sans mon partenaire” explique-t-elle.

Quelques mois après la naissance de Mila, vous avez rompu, ton petit ami et toi. Était-ce une décision difficile ?

“Bien sûr, ce genre de choix est toujours difficile, mais il est devenu plus facile pour moi de mettre fin à la relation après la naissance de Mila, parce que certaines choses sont soudainement devenues très claires. C’était une relation toxique et je voulais à tout prix protéger la santé physique et mentale de mon bébé”.

As-tu eu peur de te retrouver seule avec ta fille?

“Non, parce que j’ai moi-même été élevée par une mère célibataire, donc je savais que j’en étais capable. De plus, je faisais déjà presque tout toute seule, même lorsque nous étions encore en couple. Bien sûr, j’aurais aimé que ça se passe autrement. Comme la plupart des gens, j’avais en tête cette image idéale d’élever mon enfant avec un homme aimant. Mais, dans mon cas, faire cavalier seul était sans aucun doute le meilleur choix”.

Comment as-tu fait pour combiner la garde de Mila avec un emploi?

“J’ai arrêté de travailler pendant ma grossesse, et le plan était que je resterais à la maison avec Mila pendant un an. Mais quand mon conjoint et moi nous sommes séparés, j’ai bien été obligée de reprendre le travail plus tôt que prévu. Heureusement, j’ai rapidement trouvé un boulot temps plein. Mila allait à la crèche trois jours par semaine, un jour avec ma mère et un avec mon père. De cette façon, je pouvais tout gérer”.

Disposer d’un bon réseau sur lequel compter est-il quelque chose d’essentiel en tant que mère célibataire?

‘Absolument! Il est important d’avoir un filet de sécurité. On dit souvent “Il faut tout un village pour élever un enfant”, et c’est vrai. J’ai de la chance, ma maman est déjà à la retraite et n’aime rien de plus au monde que de s’occuper de Mila. Si elle le pouvait, elle lâcherait tout pour m’aider et je lui en serai éternellement reconnaissante. Par exemple, il est souvent arrivé que je l’appelle à la rescousse parce que je suis coincée dans les embouteillages ou que Mila est malade. Honnêtement, je ne sais pas comment je ferais sans elle”.

Selon toi, la société est-elle faite pour accueillir des mamans dans de ta situation?

“La pression est forte pour tous les parents. La société actuelle exige de nous d’avoir un bon job, de faire carrière, de réserver du temps pour voyager, le tout de façon instagrammable! Il faut prendre soin de soi, dormir suffisamment, faire de l’exercice, cuisiner des aliments frais,... Pour n’importe qui, c’est pratiquement impossible, mais surtout en tant que mère célibataire! Heureusement, de plus en plus d’employeurs accordent déjà plus d’importance aux résultats qu’aux heures de travail, et je pense que c’est une bonne évolution. À mon sens, rester concentré pendant 8 heures par jour au travail n’est pas possible, le résultat est souvent le même en 6 heures bien rentabilisées. Je pourrais utiliser ces heures supplémentaires pour lancer une machine à laver etc., car les tâches ménagères sont sans fin. Je pense aussi que ce serait une bonne idée si les parents solos, qui assument donc l’entière responsabilité des soins du nouveau-né, pouvaient utiliser 100 % du congé parental au lieu de devoir le partager avec un partenaire qui, en pratique, n’est pas présent”.

Est-ce compliqué de s’en sortir financièrement?

“Je ne pense pas que ce soit facile pour qui que ce soit en cette période, mais c’est évidemment encore plus compliqué avec un seul revenu. Les allocations représentent un bon bonus, mais ne couvrent qu’une infime partie de ce qu’un enfant coûte réellement si on additionne ses vêtements, ses loisirs, l’école, les stages, etc. Je me considère comme chanceuse d’avoir un diplôme supérieur et de pouvoir travailler en tant qu’indépendante depuis quelques années maintenant. Cela offre plus de flexibilité et un revenu avec lequel j’arrive à me débrouiller”.

Quelle est la chose la plus difficile dans le fait d’être une mère célibataire? Quand avoir un partenaire t’a-t-il le plus manqué ?

“Quand je me suis cassé la main, c’était extrêmement difficile de laver Mila et de changer ses couches avec un bras dans le plâtre. Une paire de mains supplémentaire aurait été utile (rires)! Mais en général, je tire très bien mon plan. J’ai également été élevée par une mère célibataire, donc je ne connais pas vraiment autre chose et cela fait partie de mon identité. Je puise de la force et de l’estime de soi dans le fait que je suis capable de m’occuper de ma fille seule. En tant que parent, un conjoint ne me manque pas vraiment. Mais en tant que femme, il m’arrive de souffrir de solitude”.

Y a-t-il eu des moments où tu en as eu complètement marre ?

“Mila est très sensible et même bébé, elle pleurait souvent quand j’étais stressée parce qu’elle le sentait. Dans ces moments-là, j’étais incapable de la réconforter parce que je n’arrivais pas à me calmer moi-même. Plus d’une fois, je suis sortie pour crier un bon coup ou j’ai appelé ma mère pour qu’elle vienne prendre le relais. En générale, quand elle arrivait, Mila cessait de pleurer et c’était à mon tour de fondre en larmes (rires).

Était-ce aussi émotionnellement difficile parfois?

“Oui. Je n’étais pas encore guérie de cette relation toxique dont je venais de sortir, et à cause de l’attention portée à Mila, je n’ai pas eu le temps de laisser une place à cette épreuve”.

As-tu parfois eu l’impression d’être “une mauvaise mère”?

“Bien sûr! Je pense que c’est un sentiment que chaque mère connaît un jour, qu’elle soit seule ou non. Quand Mila était à la crèche, j’avais l’impression que ses puéricultrices voyaient plus ma fille que moi. Je me suis sentie coupable à ce sujet. Quand je l’ai laissée regarder la télévision un peu plus longtemps pour que je puisse m’occuper d’autres choses, j’ai entendu cette petite voix dans ma tête me reprocher de la laisser devant un écran. Mais j’ai appris à être plus gentille avec moi-même”.

Ressens-tu parfois de la culpabilité lorsque tu t’accordes du temps pour toi?

“Honnêtement, c’est très rare. Lorsque je ressens le besoin de m’offrir un moment pour moi, je m’y autorise, car je suis une bien meilleure mère quand je suis heureuse!”.

As-tu parfois ressenti de la culpabilité envers ton entourage en refusant certaines choses?

“Pas vraiment. Mila passe toujours en premier. Si quelqu’un ne comprend pas cela, c’est son problème. C’est parfois dommage de devoir refuser une fête ou manquer un événement, mais je ne me sens pas coupable si ça arrive”.

Rétrospectivement, aurais-tu géré la situation différemment, par exemple en demandant plus d’aide ?

“Non, j’ai toujours essayé de prendre les meilleures décisions pour Mila et moi. Bien sûr, j’ai commis des erreurs, mais je ne pense pas que j’aurais pu faire mieux. Et l’essentiel est que je continue à apprendre de mes erreurs”.

Y a-t-il des avantages à être mère célibataire?

“Chaque situation possède toujours des avantages et des inconvénients. J’essaie toujours de voir le positif. Sans partenaire, vous pouvez investir plus de temps et d’énergie dans le lien avec votre enfant. En prenant chaque décision seule, il n’y a pas de différences d’opinion. C’est intéressant de confronter les avis de temps en temps, mais c’est aussi bien de ne pas avoir à discuter de l’éducation de son enfant”.

Ton histoire a-t-elle rendu ton lien avec Mila encore plus fort?

“Je pense que oui. Nous sommes meilleures amies. Oui, ma meilleure pote a 6 ans (rires)! Je sais que certains disent qu’il faut être le parent de son enfant avant d’être son ami, mais je ne pense pas que l’un doive nécessairement exclure l’autre. J’impose aussi des règles et je suis parfois stricte, mais nous formons une équipe. Elle m’écoute, je l’écoute. Cette ouverture est importante pour moi. Si quelque chose arrive plus tard, quoi que ce soit, je ne veux pas qu’elle ait peur de me le dire. J’entretiens moi-même un tel lien avec ma mère et je veux la même chose avec Mila.

Es-tu fière de la manière dont tu as géré seule ta fille dès son plus jeune âge?

“C’est même l’une des rares choses que je peux dire que j’ai bien faites dans ma vie. Je suis vraiment fière de la façon dont j’ai abordé cette épreuve”.

Maintenant que Mila est un peu plus âgée, souhaites-tu rattraper certaines choses que tu n’as peut-être pas eu le temps de faire auparavant ?

“Elle est de plus en plus autonome et cela ne fera que s’améliorer. À un moment, elle sera même assez grande pour rester seule à la maison. Mais d’un autre côté, j’apprécie qu’elle ait encore autant besoin de moi et je ne suis pas prête pour le moment à ce que ça ne soit plus le cas”.

Quels conseils donnerais-tu aux mamans solos?

“Ne vous en voulez pas que votre enfant ne grandisse pas dans une famille modèle. Même dans une famille avec à la fois une mère et un père, les parents ou les enfants peuvent être malheureux. Mieux vaut être seule que mal accompagnée. En vous choisissant, vous apprenez également à votre enfant que cela est permis, afin qu’il puisse plus tard choisir son propre bonheur. Après tout, chaque parent veut un enfant heureux, mais chaque enfant veut aussi un parent heureux !”.

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