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#MeTooInceste, un hashtag pour briser un silence étouffant

Kathleen Wuyard


Dans la foulée de la sortie du livre de Camille Kouchner témoignant de l’inceste dont son jumeau a été victime, les langues se délient et les témoignages s’accumulent sous la bannière #MeTooInceste sur les réseaux sociaux. Une libération de la parole qui délie bien plus que les langues.


C’est l’événement littéraire de ce début 2021, un livre qui a réussi à faire l’effet d’un uppercut dans une actualité pourtant déjà rudement malmenée entre pandémie, émeutes à Washington et autres menaces à l’ordre établi. Et quelque part, le livre de Camille Kouchner, “Familia grande”, en est une aussi, une manière de dire aux impunis, protégés par la loi du silence, que leur heure est venue. Paru aux éditions Seuil, le témoignage de Camille Kouchner, juriste parisienne et “fille de” de renom, lève le voile sur ce que sa famille et nombre d’autres auraient préféré taire: l’inceste dont un de leurs membres a été victime. Soit son frère jumeau, doté pour l’occasion d’un prénom d’emprunt. Enfants de l’ex-ministre socialiste et médecin français Bernard Kouchner ainsi que de l’avocate Evelyne Pisier, Camille et son jumeau vivent très jeune le divorce de leur parent. Et se réjouissent de voir l’absence laissée par ce père magnétique et brillant mais accaparé par son travail être comblée par le nouveau mari de leur mère, Olivier Duhamel, politologue renommé.

Se libérer du poids du silence


“C’est l’histoire d’une grande famille qui aime débattre, rire et danser, qui aime le soleil et l’été. C’est le récit incandescent d’une femme qui ose enfin raconter ce qui a longtemps fait taire la familia grande” explique la quatrième de couverture de “Familia Grande”. En interview, Camille Kouchner, de tous les médias depuis la parution de son livre, confie pour sa part avoir eu besoin de lever la chape du silence, celle qu’elle s’est auto-imposée mais aussi celle qu’on l’a contrainte de porter. Sur le plateau de “La Grande Librairie”, elle fait ainsi part de sa prise de conscience tardive et de cette réalisation que les incursions nocturnes de son beau-père dans la chambre de son frère ne sont “pas normales”, quoi qu’Olivier Duhamel veuille leur faire croire.

J’ai pris la mesure de ce qui était arrivé à mon frère (...) C’est important de le dire parce que l’inceste, l’emprise, la maltraitance des enfants, c’est vraiment partout”.



Même dans les dynasties françaises les plus prestigieuses, et sans véritable surprise puisque selon un sondage réalisé par l’Ipsos, un.e Français.e sur dix aurait déjà été victime d’inceste.

Le bruit assourdissant de #MeTooInceste


Un crime dont la victime se sent le plus souvent en partie coupable, cette dualité permettant d’acheter son silence. Même si, depuis la sortie de la “Familia grande”, un formidable mouvement de libération de la parole déferle sur les réseaux sociaux. À l’heure d’écrire ces lignes, le hashtag #MeTooInceste compte ainsi plus de 100 000 mentions, entre témoignages d’agressions commises par un père, un frère, un oncle ou d’autres membres de la famille.

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À l’origine de ce cri de ralliement, la militante de #NousToutes Madeline Da Silva, formatrice dans la lutte contre les violences sexistes et sexuelles, assure qu’il y aura “un avant et un après”. Dans un entretien accordé à France Inter, elle souligne l’impact de l’initiative, mais tempère l’enthousiasme, car ainsi qu’elle le rappelle, de nombreuses victimes ont déjà essayé de dénoncer par le passé.

On voit aussi, à travers ces messages, que les victimes d’inceste parlent, mais ne sont pas entendues : certaines ont posé des mots très clairs sur ce qui leur est arrivé mais la réaction de leur entourage a été inadaptée, de même que celle des professionnels à qui elles se sont confiées”.


Et d’ajouter qu’avec “ces témoignages, on voit bien qu’on pourrait sauver des milliers d’enfants si l’on formait les professionnels qui passent du temps avec eux à détecter les signaux, accueillir la parole, orienter et signaler”. Dans l’édition de ce mercredi 20 janvier de la newsletter féministe Les Glorieuses, Rebecca Amsellem dénonce pour sa part les délais de prescription d’un viol, “de trente ans pour les mineur.e.s et de vingt ans pour les majeur.e.s. Ils ne laissent pas suffisamment de temps aux survivant.e.s d’inceste pour réaliser ce qu’elles et ils ont vécu”. Avant de souligner que “tous ces témoignages et enquêtes permettent de créer une nouvelle norme, où les femmes, toujours plus nombreuses, n’acceptent plus l’autorité des puissants qui ont abusé de leur domination. Elles pavent le chemin pour toute une génération qui n’auront plus peur de leur père, de leur frère, de leur grande tante, ni de leur oncle. Un chemin où elles seront libres”.

Et si vous êtes vous-même en train de penser à prendre ce chemin, sachez qu’il existe plusieurs instances auxquelles vous confier. Vous pouvez bien sûr joindre votre voix au chorus #MeTooInceste, mais aussi contacter l’ASBL SOS Inceste Belgique sans oublier la police ainsi que les différents services d’aide aux victimes recensés par Brise le Silence.



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