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Mediapart dévoile une enquête choquante sur le viol des personnes âgées en maisons de retraite

Justine Rossius

L’enquête révélée par Mediapart est bouleversante: elle dévoile qu’en France, des dizaines de résident·e·s de maison de retraite ont été victimes de violences sexuelles. Ce ne serait que le sommet de l’iceberg selon le média d’enquêtes.

Tout a commencé avec l’histoire de Denise P., une dame âgée de 93 ans, résidente à l’Ehpad* de Montrevel-en-Bresse, découverte inconsciente, le visage tuméfié de sang et sa protection hygiénique abaissée. Un médecin légiste lèvera ainsi le voile sur un sujet presque impensable: Denise a été victime d’une agression sexuelle, en plus d’un traumatisme facial avec fracture. Les journalistes de Mediapart ont enquêté sur cette affaire et ont réussi a retrouvé la trace d’une centaine de victimes déclarant qu’il ne s’agirait que de la partie émergée de l’iceberg.

*En France, l’établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes est la forme d’institution pour personnes âgées la plus répandue.

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La temps presse, la justice traîne

Ces viols au sein même d’un établissement pour personnes âgées montrent à quel point celles-ci sont des proies faciles pour les agresseurs qui, l’enquête le prouve, ne risquent finalement pas grand-chose. Pour Denise, par exemple, le personnel avait déjà fait le ménage sur le lieu de la chute avant d’appeler la police, une heure et demie après avoir retrouvé la victime. Ils pensaient qu’il s’agissait d’une simple chute. Autre élément qui explique que des agresseurs commettent de tel crime sans s’en sentir inquiété? L’âge des victimes et leur décès arrivant souvent peu de temps après l’agression, à cause du traumatisme psychique et physique. Denise, par exemple, est décédée un an après ce viol, elle souffrait, d’après l’expertise médicale, « d’un déficit fonctionnel temporaire total de 100 % […] de séquelles immédiates engendrées sur le plan neurologique et psychique et d’une aggravation de la perte d’autonomie »Denise s’est laissée mourir. L’état des patient·e·s à cet âge avancé et la lenteur de la justice sont deux des nombreux éléments qui empêchent les victimes d’obtenir justice, mais aussi simplement de se rendre à l’audience pour témoigner.

Des viols commis par le personnel

Les journalistes à la base de cette enquête ont aussi révélé que près de la moitié des viols à l’Ehpad étaient commis par des membres du personnel. « D’après notre propre recueil de données, sur la dernière décennie, 46 % des viols et agressions sexuelles médiatisées ont été commis par des membres du personnel » souligne le média. En seconde catégorie, on retrouve les résidents (des hommes), et enfin, beaucoup moins nombreux, les personnes extérieures à l’établissement, comme la famille. Pour les résidents, bien que cela soit choquant et surprenant, il ne faut pas oublier que les personnes ayant un passé criminel en matière de violences sexuelles vieillissent elles-aussi et peuvent se retrouver en présence d’opportunités et ainsi récidiver, sans que cela ne soit la conséquence de maladies dégénératives. Car c’est cet argument qui peut entraîner le personnel des maisons de repos à ressentir de la pitié pour ces violeurs, certes âgés, mais toujours détraqués.

Et en Belgique?

En Belgique, une enquête sur le sujet avait été réalisée en 2021: elle dévoilait ce qui suit. Pas moins de 44 % des personnes âgées de plus de 70 ans ont subi au moins un type de violences sexuelles au cours de leur vie. Et une sur 12 déclare en avoir été victime au cours des 12 derniers mois. 60 % n’ont jamais divulgué les faits et 94 % n’ont jamais demandé de l’aide.

La problématique des violences sexuelles sur les personnes âgées — on le voit — rentre dans un système global, mais  elle comporte des pistes d’amélioration spécifique, ainsi que l’expliquent Phillipe Thomas et Cyril Hazif-Thomas, deux psychiatres auteurs de Les violences sexuelles faites aux personnes âges, à lire ici : “(…) La nécessité d’avoir de bonnes politiques et de bons systèmes de déclaration, étape importante dans la lutte contre les abus sexuels à l’encontre des personnes âgées. Les équipes soignantes sont souvent bouleversées par ce type d’agression et doivent être soutenues psychologiquement. (…) La prévention des abus sexuels est très difficile à mettre en place chez les personnes âgées, en grande partie parce qu’elles sont parfois involontairement facilitatrices de l’agression, ouvrant la porte à un agresseur, ou trop confuses pour se rendre compte des conséquences de leurs actes. De plus, même conscientes, elles ne portent pas suffisamment plainte contre ceux qui les ont agressées, pouvant ainsi faciliter parfois une récidive.

Dans les Ehpad et dans les établissements de santé, les portes des chambres pourraient disposer de poignée à l’intérieur et ne s’ouvrir de l’extérieur qu’avec une clé disponible pour les malades ou les résidents capables de l’utiliser, et un passe-partout à la disposition des soignants. Contre l’isolement et la solitude, la vigilance du voisinage, des aides à domicile, des soignants en Ehpad et des familles est parfois la seule ressource.”

Si cette étude révèle des éléments abjectes, qui dépassent les limites de l’entendement, elle est pourtant nécessaire et prouve encore une fois que les violences sexuelles sont un phénomène qui touche toutes les couches de la population, peu importe l’âge ou la classe sociale. Un âge élevé n’est pas une protection contre le comportement des violeurs. Seules la justice et l’éducation des hommes peuvent l’être.

L’enquête est à découvrir en intégralité sur le site de Mediapart, via ce lien. Elle contient des éléments détaillés pouvant choquer.

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