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Noël - Getty
Noël - Getty

À CŒUR OUVERT: ““ce Noël où ma famille a appris que j’aime désormais les filles””

Manon de Meersman

Il y a quatre ans, ma vie a complètement basculé. J’ai rencontré une fille, à la période de Noël, et j’en suis tombée amoureuse, alors que jusque-là, je n’avais aimé que des garçons. Il y a trois ans, le 25 décembre, j’ai annoncé à ma famille que j’étais en couple avec une femme et depuis, Noël n’a plus la même saveur.

J’étais encore aux études lorsque je me suis rendu compte que je suis homosexuelle. C’était il y a cinq ans et demi maintenant. Je sortais d’une relation de six ans avec un garçon que j’avais aimé de toutes mes tripes et qui m’avait toujours respectée comme personne d’autre n’aurait pu mieux le faire. Cette année-là, j’ai pris un appartement en colocation, alors que jusque-là, j’avais toujours été en internat, et j’ai décidé de vivre ma nouvelle vie de célibataire à 100%. En pleine période de Fêtes, une amie avec qui j’étais à l’internat décide d’organiser un petit Noël entre potes, dans son nouveau chez elle et sans que je ne le sache, ce jour allait changer ma vie.

Une rencontre inattendue

Cette amie vivait en colocation avec une autre fille, fille qui assumait fièrement et sans aucun problème son homosexualité. Ce jour-là, lorsque je l’ai rencontrée, je ne l’ai pratiquement pas calculée; j’étais trop occupée à profiter des retrouvailles avec mes potes d’internat et de l’ambiance de Noël que j’affectionne tant. Or, elle, elle m’avait calculée. Elle m’a écrit après la soirée, mais je n’y ai pas trop prêté attention. Puis on s’est revues. Une fois. Deux fois. Trois fois. Et ainsi de suite. Plus je la voyais, plus je me posais des questions, mais je refoulais ces dernières dans un coin de ma tête. C’est vrai, quoi, après tout, j’aimais les hommes, moi! D’ailleurs, à partir de ce moment-là, chaque petit pas que je faisais avec un garçon se transformait en échec cuisant. Mmh, tiens tiens, bizarre, hein?

Les mois ont passé et je me suis attachée, à un point tel que je me suis rendu compte que je ne pouvais pas ressentir ce que je ressentais pour elle, pour une amie. Mes amies ne me manquaient pas à m’en tordre l’estomac lorsque je ne les voyais pas et elles ne me procuraient pas des sensations dans le ventre lorsque je passais du temps avec. Le déclic a donc eu lieu six mois après ma rencontre avec cette fille. Six mois où ont défilé les phases successives d’indifférence, de déni, de panique, d’angoisse, de remise en question, de confrontation franche avec la réalité et celle que je suis et enfin, d’acceptation. Le déclic est arrivé grâce à la Gay Pride. Cette fille mixait sur un char et je suis allée la voir. C’était évident. La façon dont je la regardais était à elle seule la confirmation de mes sentiments. Une semaine plus tard, on se mettait en couple et c’était l’amour passionnel comme je ne l’avais jamais vécu; on ne se lâchait plus d’une semelle et on s’aimait à la folie. Cet amour a duré un peu plus de deux ans.

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Un Noël pas comme les autres

J’ai toujours eu des parents ouverts et à l’écoute de ma personne. Je suis fille unique et j’avais jusque-là tissé un lien très fusionnel avec mon père et ma mère. Je leur racontais tout très facilement et c’est la raison pour laquelle, je leur ai annoncé que j’aimais une fille de la manière la plus naturelle du monde, le lendemain où je me suis mise en couple avec cette nana. Pas le temps de niaiser, hein. Cela a été compliqué sur le moment, mais ils ont respecté mon choix, émettant  tout de même des réserves, justifiées aujourd’hui, à l’égard de la personne avec qui j’étais. En revanche, hormis mes parents, personne d’autre dans ma famille était au courant de mon homosexualité. Et ça a été le cas pendant un an et demi, malgré des petites remarques du genre: “Ben alors, t’es devenue lesbienne que tu nous as toujours pas présenté de garçons”. On imagine facilement ici le rire jaune qui sortait d’entre mes dents lorsque j’entendais cette phrase...

Il y a trois ans, à Noël, je revenais d’un mois à l’étranger; mois où j’avais voyagé seule, pour me ressourcer et me faire prendre confiance en moi. Ce retour en force était donc l’occasion idéale pour annoncer à ma famille que j’étais en couple avec une femme. Quoi de plus beau que la période de Noël pour dire les choses après tout... Erreur fatale. Le 25 décembre 2018 m’a laissé un goût amer puisque j’ai passé une partie de la journée à pleurer dans ma salle de bains, mon joli maquillage festif réduit à néant, en même temps que mon coeur qui avait explosé en miettes. En fait, une partie de ma famille était déjà au courant. Quelle surprise, donc, lorsque j’ai voulu dire moi-même les choses et qu’on m’a rétorqué des remarques terriblement dures à ce sujet. “C’est qu’une passe”, “Une si jolie fille ne peut pas être lesbienne”, “Moi je ne pense pas que ce soit ton bord” ou encore “Faut faire ses expérience, hein”. Les larmes coulaient à flot et je me sentais abandonnée et incomprise alors que jusqu’à ce jour, j’avais assumé fièrement mon homosexualité dans toutes les facettes de ma vie, en-dehors de ma famille. Heureusement, certains d’entre eux ont sauvé l’honneur ce jour-là en me réconfortant et venant contraster ce tableau bien trop noir pour un jour de Noël.

Une évolution positive

Depuis ce Noël, je me suis séparée de cette fille. Cette rupture a été l’occasion de me rendre réellement compte que oui, j’ai aimé un garçon, mais que maintenant j’aime aussi les filles. Je n’aime pas me mettre dans une case car les étiquettes nous rendent la vie impossible. Je me considère comme queer, car j’aime l’Humain, via le prisme d’un amour qui ne connaît pas les notions de genre et de sexe. Ma famille accepte aujourd’hui mon orientation sexuelle et je m’assume mieux que jamais. Mon orientation sexuelle, quelle qu’elle soit, ne définit pas mon identité et j’ai mis si longtemps à le comprendre. Le temps fait bien les choses, mais malgré tout, Noël sera toujours marqué de ce combat mené pour faire accepter celle que je suis, laissant dans ma tête et dans mon coeur quelques blessures de guerre.

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