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© A group of young people celebrating and making party at home

#MeToo de la guindaille: sans viols, la fête est plus folle

Kathleen Wuyard


Sur la page ULg confessions, le ras-le-bol d’une étudiante victime d’attouchements au Chapi a relancé le débat sur les violences sexuelles en guindaille. Entre sexualisation des évènements et alcool qui coule à flots, la fête a en effet trop souvent tendance à dégénérer.


“Sinon les attouchements/agressions sexuelles en chapi/guindailles on en parle ?” interroge la jeune étudiante de l’Université de Liège dans son post, diffusé anonymement sur la page ULg Confessions. Présente lors du Chapi S’raing’s Lagueule du CB Seraing ce lundi 17 février, elle a eu le déplaisir de se faire mettre une fessée “par deux fossiles” alors qu’elle attendait ses bières. Un comportement tout sauf festif qu’elle affirme avoir déjà subi de la part de baptisés aussi. La guindaille ferait-elle mâle aux femmes? Le témoignage de l’étudiante liégeoise n’est pas le premier à soulever la questions des agressions sexuelles en contexte de fête étudiante ou de baptême.

Pratiques dégradantes


En 2017, en réaction à #BalanceTonPorc, “Agathe”, une baptisée Philo, avait dénoncé sur ParisMatch.be les jeux douteux auxquels étaient soumis les bleuettes et avait lancé le mouvement #BalanceTaBleusaille. Revenant sur l’accueil, “l’activité avec un grand A” à laquelle la participation est obligatoire sous peine de ne pas être baptisée, elle faisait part de comportements problématiques, loin de se limiter au seul CB Philo.

Les bleuettes doivent y ôter le haut de leur bleu de travail. Elles passeront l’activité en soutif (...) Une bleuette est couchée sur le dos ; un bleu, à poil (selon l’expression consacrée) se met à quatre pattes au-dessus de son visage. Un comitard déverse de la bière dans le dos du garçon ; bière qui s’écoule sur ou dans la bouche de la fille”


Dégradant? Sans aucun doute possible, oui. Surprenant? Pas vraiment, car même si certains comités de baptême refusent de s’abaisser à ce genre de pratiques, c’est tout l’univers de la guindaille qui joue sur une sexualisation des fêtardes.

Saint Drums Guindaille (1)



Ainsi, alors que le S’raing’s Lagueule était pointé du doigt pour les attouchements dont l’étudiante avait été victime, le CB Droit a été rapidement épinglé aussi par les internautes, peu friands de l’affiche et de la description de la Saint Drums. Légendé “Kiff les femmes”, l’évènement est représenté par le dessin d’un homme bavant d’extase, giflé par deux derrières féminins, tandis que la description promet “les juristes les plus sexy de Liège” ainsi que la soirée “la plus chaude”. S’il s’agit évidemment ici d’une tentative d’humour un peu beauf, et que rien ne justifie les comportements inacceptables de certains envers les femmes en guindaille, il est toutefois intéressant de se demander si cette over-sexualisation de certaines soirées ne contribue pas à un sentiment de “tout est permis” dans l’esprit de certains fêtards.

Des “solutions” culpabilisantes


Pour l’étudiante à l’origine du post sur ULg Confessions, cela ne fait aucun doute: il est temps d’agir. Contre les agressions sexuelles, mais aussi, de manière plus générale, pour faire changer les mentalités.

Tout le monde est déglingué en chapi, et certaines petites bites croient s’en sortir tout permis ; et quand on bade parce qu’il vient de nous arriver un truc du genre, on est la rabat-joie de la soirée et c’est co nous qui nous sentons mal d’avoir subi une agression”


Et de prendre en exemple les commentaires sous son post, certains proposant “d’apprendre l’auto-défense” aux fêtardes, ce que l’auteure du post dénonce comme des solutions inadaptées et culpabilisantes.

Sans parler des agressions plus sévères qui sont discréditées parce que “vous étiez tous les deux trop bourrés, tu peux pas parler de consentement” ... BEN SI EN FAIT


Ou bien non?

“Assume tes actes!”


Le 15 janvier dernier, le tribunal correctionnel de Liège a ainsi octroyé la suspension du prononcé à un étudiant auteur d’un viol lors d’une guindaille. En 2017, lors d’une soirée organisée des étudiants de facultés médicales et paramédicales, l’accusé avait violé une jeune fille d’une autre faculté, avant d’affirmer ne pas se souvenir des faits, alcool oblige. Une explication qui avait suffi à convaincre le tribunal, mais qui enrage, certains soulignant “Facile de perdre la mémoire ! Assume tes actes mon gars, il y a des témoins !” tandis que pour l’étudiante à l’origine du post anonyme ULg, “j’en ai marre je veux pouvoir me mettre la pire sans regretter d’avoir un peu trop bougé mon boule sur les barrières nadar”.

viol guindaille ulg



Tout en rappelant que “la plupart d’entre nous prête serment au moment du baptême de ne pas se battre en guindaille, on ajouterait pas le respect du corps des autres dans les conditions pour être un bon baptisé ? Ou un bon guindailleur (ou citoyen) tout court ?”. Du côté du CB Seraing, qui organisait la soirée de ce lundi où les attouchements ont eu lieu, on condamne les faits, et on rappelle que “des agents de sécurité sont présents lors de ces événements. Il ne faut pas hésiter à aller les trouver suite à des comportements inadaptés”, mais l’idée avancée par la victime de la fessé a interpellé l’Association Générale des étudiants liégeois (AGEL). 

Les baptisés sont déjà sensibilisés à ces problématiques, mais l’idée d’adapter le serment avec quelque chose de très précis sur le respect de l’intégrité physique de l’autre – au-delà du simple « je ne me battrai pas en guindaille » est par exemple une excellente idée. Des réflexions plus larges sont déjà entreprises avec l’Université et dans le cadre de la charte”


Parce qu’avec ou sans alcool, c’est surtout sans viols que la fête est plus folle, mais on est encore loin du compte: ainsi que le rapportait RTL Info à l’automne 2017, en Belgique, un étudiant sur cinq a été victime d’une tentative de viol ou d’un viol, principalement des jeunes femmes, lors de guindailles. En 2018, la Faculté des sciences de la motricité (FSM) de l’UCL avait désavoué la Maison des athlètes francophones (MAF) après que coups, attentats à la pudeur et sévices sexuels aient été commis par des parrains de baptême envers leur bleusaille. Problème: malgré la gravité des faits dénoncés, la FSM s’est bornée à ne plus reconnaître le cercle comme association estudiantine facultaire... jusqu’en septembre 2021 seulement.

Psychose à l’UCL


Face à un sentiment de laissez-aller et de ras-le-bol général, les étudiant.es protestent. En dénonçant les faits sur des forums estudiantins, comme la victime d’attouchements au S’raing’s Lagueule l’a fait, mais aussi parfois, par des moyens plus élaborés. Il y a quelques semaines, le récit en plusieurs épisodes de “Sarah”, une étudiante de l’UCL dénonçant un réseau de violeurs sévissant sur le campus, avait tenu les internautes en haleine... Une histoire en réalité inventée de toute pièce par un étudiant soucieux de dénoncer l’omerta autour des agressions sexuelles dans le milieu estudiantin.

Cette année, aux 24h vélo, des informati­ons ont circulé selon lesquelles des filles avaient été droguées. A part dans certains cercles ou régionales, on n’en a presque pas entendu parler. Lou­vain-la-Neu­ve est une ville géniale, à l’ambiance unique, mais cela ne veut pas dire qu’il ne peut pas s’y passer des choses graves. Des monstres, il y en a partout”


Et d’ajouter que si l’histoire des violeurs au GHB était fausse, “vous avez aussi compris (si vous ne le saviez pas déjà) qu’il faut toujours rester prudent en soirée, sans bien entendu tomber dans la paranoïa”.

Vous avez été victime de viol ou d’agression sexuelle en soirée?


Lors d’une conférence intitulée “Violences sexuelles: conséquences et prévention”, des conseils avaient été diffusés par le centre de prise en charge des violences sexuelles (CPVS). Les voici.

Comment réagir

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Il est important de préserver tout ce qui peut servir de preuve.

Qui contacter (Liège)

Qui contacter (Liège)

Qui contacter (Liège)

Différents services ont été mis en place, dont un au sein même de l’ULiège.

Et dans les autres villes étudiantes?

Et dans les autres villes étudiantes?

Et dans les autres villes étudiantes?

À Bruxelles, l’ASBL SOS Viol, rue Coenraets 23 (1060), téléphone 0800/98 100. À Namur, le service d’aide aux victimes, rue Armée Grouchy 20B, Tél : 081 74 08 14. À Mons, Avenue de l’hôpital, 54, Tél : 065 35 53 96. À Louvain-la-Neuve, rue du Monument 54, Tél: 010/43.63.58



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