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Témoignage: ““Je suis fière de mon job, même s’il est difficile!””

Barbara Wesoly

Sandra, 27 ans, est éboueuse. Même s’il est pénible physiquement et bien souvent mal considéré, la jeune femme aime son job. Elle en raconte les avantages et les joies qu’elle y trouve.


“Naturellement, je n’aurais jamais pensé qu’un jour je finirais derrière un camion poubelle, mais la vie en a voulu ainsi, et j’en suis plutôt contente. J’ai obtenu mon diplôme d’études secondaires assez facilement et mes professeurs pensaient que je pouvais suivre des études universitaires si j’en avais envie. Mais après six ans d’études secondaires, j’en avais déjà assez. À 18 ans, je voulais faire quelque chose de plus concret. Je suis donc partie à la recherche d’un travail et j’ai fait plein de petits boulots: livreuse de pizza, animatrice dans une ferme pédagogique… Tout m’intéressait. Mais plus le temps passait, plus j’entendais des histoires passionnantes sur la vie des chauffeurs de poids lourd, et j’ai commencé à envisager sérieusement de débuter une carrière là-dedans. J’ai donc pris le taureau par les cornes et j’ai entamé ma formation. J’ai obtenu mon permis de conduire C et j’ai suivi une formation pour devenir chauffeur professionnel.

Sans regret


Pleine de courage, j’ai commencé à postuler et à écrire à toutes les entreprises qui étaient à la recherche de chauffeurs de camion. Je rêvais déjà d’une carrière en tant que transporteur routier. Mais quand j’ai rencontré mon compagnon et que j’ai dû emménager plus loin, j’ai dû trouver de façon urgente un nouveau job et j’ai répondu à un maximum d’annonces locales. L’entreprise de récolte des déchets dans laquelle je travaille aujourd’hui a été la première à répondre à ma candidature et à m’inviter pour un entretien. J’ai un peu paniqué en apprenant que le chauffeur ne devait pas uniquement s’asseoir au volant, mais qu’il devait pouvoir aussi marcher derrière le camion poubelle. J’ai annoncé la nouvelle à mes parents, un peu gênée, mais ils m’ont soutenue à fond.

Je voulais absolument donner une chance à ce job. J’ai donc décidé de relever le défi et j’ai pris mon courage à deux mains pour commencer en tant qu’éboueuse. Une décision qu’aujourd’hui, cinq ans plus tard, je ne regrette pas une seule seconde.


Elle m’a même fait rencontrer l’amour. J’ai connu mon compagnon actuel au travail, et il est très fier de moi.

Jamais sans mon make-up


Un jour de travail ordinaire, les éboueurs arrivent dans la cantine à sept heures et demie et boivent un café tous ensemble en papotant. Ensuite, nous recevons chacun une carte de transport avec une carte essence ainsi que l’itinéraire que nous devons suivre ce jour-là. On se rend par équipe de trois dans les camions: deux personnes derrière le camion à ordures, et la troisième au volant. Nous changeons volontiers les rôles ou nous mettons d’accord, en fonction de qui préfère quelle tâche. Avant de partir sur la route, nous effectuons un contrôle rapide du camion et nous partons ensuite récolter les ordures durant deux heures. Nous prenons une courte pause-café et nous repartons deux heures sur la route jusqu’au lunch. L’après-midi, nous terminons notre ronde et puis nous déversons les déchets jusqu’à environ seize heures. Même si je passe ma journée au milieu des déchets, cela ne m’empêche pas de m’apprêter chaque jour avant de partir travailler. Je ne passe pas la porte sans maquillage. Avec un peu de mascara et du rouge à lèvres, je me sens beaucoup plus féminine. J’accorde moins d’attention à mes vêtements, car j’enfile un uniforme de travail. Il arrive qu’après avoir sorti mon chien le matin, je me rende au travail en jogging.

Peu de respect pour mon job


“Quand les gens voit une jeune blonde marcher derrière le camion, ça provoque pas mal de réactions. Mais je reçois surtout des remarques positives et j’apprécie beaucoup. Une femme qui fait ce job, c’est plutôt unique. Cela reste un univers masculin, et j’ai dû faire face à des préjugés, mais j’ai aussi très vite trouvé ma place. Je passe des chouettes moments avec mes collègues masculins et je rigole beaucoup avec eux. Il y a vraiment une bonne ambiance de travail, ce qui rend ce job beaucoup plus agréable, bien qu’il soit éprouvant. Car il ne faut pas sous-estimer la difficulté physique. Beaucoup ne se rendent pas compte que les ordures sont ramassées par des personnes, pas des machines. Nous avons déjà été confrontés de nombreuses fois à des poubelles que nous n’arrivions pas à soulever même à deux, ou encore des poubelles qui contiennent des matières dangereuses comme du verre ou de l’amiante. C’est incroyable ce que les gens osent jeter. Et cela montre bien le manque de respect que les gens ont pour notre métier. Sur la route aussi, les gens tiennent rarement compte de nous. Certains de mes collègues ont déjà été renversés. Les automobilistes perdent parfois patience quand ils roulent derrière nous.

On dénigre encore souvent, à tort, notre travail. Comme si on faisait le job d’éboueur ou éboueuse uniquement en sortant de prison, ou comme si on n’avait vraiment rien trouvé d’autre. On m’a un jour demandé si j’avais été amenée devant un juge qui m’avait donné des travaux forcés et que c’était ainsi que j’avais fini comme éboueuse.


Pourtant mes collègues et moi avons dû donner un certificat de bonnes vie et mœurs avant d’être engagés. Nous voulons tout simplement gagner notre vie de façon honnête.

Une grande satisfaction


Par équipe de trois, nous ramassons minimum mille sacs-poubelle par jour. Après cinq ans, mon corps subit les conséquences de ce travail physique. J’ai souffert tout un temps d’une blessure au coude qui n’arrivait pas à guérir. Devoir travailler dans le froid est pénible, mais les températures élevées sont aussi très dures. Mais c’est la pluie que je déteste le plus. Heureusement, ce n’est pas toujours la catastrophe. Il y a aussi des gens qui nous proposent une boisson fraîche en été ou qui nous saluent gentiment. Nous recevons un bon salaire. Et puis toutes les occasions sont bonnes pour s’amuser un peu. Nous avons un jour trouvé une prothèse de jambe entre les déchets d’une maison de retraite. Nous l’avons accrochée à la vitre du camion… On a ri toute la journée. L’ambiance entre collègues est primordiale pour moi, mais ma plus grande satisfaction c’est toujours quand je peux aider des gens ou des animaux en détresse. J’ai déjà appelé plusieurs fois les secours pour animaux en découvrant un animal blessé. Ou j’ai un jour dégagé une grosse pierre qui était tombée d’un camion avant qu’une voiture ne vienne s’abîmer dessus. Ce genre de choses me donne toujours un sentiment agréable à la fin de ma journée. Et puis le luxe de pouvoir travailler à l’air extérieur n’a pas de prix.

Nouveau challenge


Seul l’avenir me dira encore combien de temps je continuerai à faire ce job. Il y a peu, on m’a proposé de commencer une formation pour planifier les camions-poubelle et les chauffeurs. Je relèverai sûrement ce défi un jour, tout comme j’ai accepté le défi de devenir éboueuse il y a cinq ans. Il y a des possibilités d’évolution dans les mois à venir, je ne devrai donc plus marcher derrière le camion. Et si ça devait se passer, la vie en extérieur et mes collègues me manqueraient beaucoup, c’est sûr. Mais je n’ai pas encore de garantie, je n’y pense donc pas trop. On verra bien ce que l’avenir me réserve!”

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