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© Getty Images

Témoignage: Gwen souffre d’alopécie depuis ses huit ans

Barbara Wesoly

Combien de fois n’avons-nous pas râlé le matin face à notre tignasse qui ne tombe pas comme on le voudrait? Même si souvent, nos cheveux nous ­désespèrent, pas une ­seconde nous n’imaginons ce que cela pourrait nous faire de ne plus en avoir. C’est ce qui est arrivé à Gwen, qui souffre d’alopécie.

“Un jour, à l’âge de 8 ans, alors que je prenais un bain et que ma mère m’aidait à me laver les cheveux, elle a remarqué que j’avais une grande plaque chauve sur le côté de la tête. La chute des ­cheveux de cette zone avait dû se ­produire petit à petit car nous n’avions rien remarqué jusque-là.

Nous avons été voir un dermatologue qui a confirmé l’inquiétude de maman: j’avais une alopécie, une affection que ma grand-mère avait eu également et qui signifie la perte des cheveux, totale ou partielle.

Dans le cas de ma grand-mère, cela avait disparu à l’âge de 20 ans. Il m’a prescrit un produit que je devais mettre sur mon crâne, mais cela n’a eu aucun effet. Maman a alors décidé d’aller voir un autre médecin, spécialisé dans l’alopécie. J’ai reçu une pommade à la cortisone, qui a heureusement fait ­repousser mes cheveux. J’avais encore quelques petites plaques chauves, mais il suffisait d’appliquer un peu de cette pommade pour que mes cheveux ­finissent par repousser. Lorsque j’ai ­entamé mes études, dès ma première session d’examens, j’ai à nouveau ­commencé à perdre mes cheveux. Ma longue chevelure blonde a ­progressivement disparu, pour faire place à des cheveux foncés, fins, fragiles et bouclés. J’essayais comme je pouvais de camoufler cela mais ça devenait de plus en plus difficile.

Un cap décisif

Il y a deux  ans, après mon examen ­d’entrée en médecine dentaire, j’ai ­perdu pratiquement tous mes cheveux. Cette période a été très difficile à vivre.  Il ne me restait que quelques touffes de cheveux sur le côté et à l’arrière de la tête, mais plus rien au-dessus. J’avais l’air malade.

Chaque matin, dans la salle de bains, j’enlevais ce qu’il me restait de cheveux pour qu’ils ne s’éparpillent pas partout dans la maison. Jusqu’à ce qu’il ne reste presque plus rien.

À ce moment-là, j’ai décidé de les raser. Ça a été une étape très difficile à franchir, mais je ­savais que c’était ça qu’il fallait faire. Je me battais depuis longtemps pour préserver mes cheveux, c’est comme si je baissais les bras face au combat. Il m’a fallu 10 minutes avant d’oser me voir chauve pour la première fois dans le miroir. J’ai éclaté en sanglots.

Ce n’est “que” ça

Pendant plusieurs semaines, je ne suis pas sortie de chez moi. Je n’osais même pas aller au supermarché. Je ne voulais pas que les gens me voient comme ça. J’aurais pu mettre un foulard ou un bonnet, mais il faisait très chaud et je n’aimais pas l’idée de me cacher sous un chapeau. Quelques semaines plus tard, je me suis enfin décidée à sortir avec un foulard sur la tête. Mes amis se sont inquiétés et ont ­directement imaginé que j’avais un cancer ou une maladie grave, mais heureusement, j’ai pu les rassurer en leur disant que ce n’est ‘que’ la conséquence de mon alopécie.

Un investissement

Quelques temps plus tard, ma mère et moi sommes allées dans un magasin de perruque pour la première fois. Nous avons vite compris que si nous voulions une perruque de qualité, il fallait ­débourser plus de 2600 euros. C’était beaucoup trop cher pour nous, alors on a cherché une autre solution. Comme je ne suis pas atteinte de cancer, la ­mutuelle et les assurances interviennent peu dans le remboursement. Pour une demande d’intervention pour une perruque, je recevais 180 euros. Je me suis alors souvenue d’un article que j’avais lu des années auparavant dans lequel une jeune fille atteinte d’alopécie avait reçu une perruque grâce à une ­association. Papa a découvert que cette organisation se trouvait à deux pas de chez nous. Mais je devais avoir moins de 18 ans pour bénéficier de cette aide, et il ne me restait que quelques semaines avant devenir majeure: il fallait se ­dépêcher.

J’appréhendais beaucoup le fait de porter une perruque, j’étais persuadée que ça se verrait et que ­personne ne pourrait penser que ce sont de vrais cheveux. Eh bien pas du tout: j’ai été surprise de leur aspect naturel.

Alopécie androgénétique: comment la reconnaître et quelles sont les solutions?

La première perruque

J’étais blonde avec des cheveux lisses durant toute mon enfance, mais suite aux nombreux traitements, ils sont ­devenus bruns, bouclés et très fins. Mes parents m’ont convaincue de choisir une perruque dans les tons de ma couleur naturelle d’origine, le blond. J’en ai ­profité pour choisir un modèle avec de très longs cheveux, un rêve qui jusque-là m’était inaccessible. J’allais enfin avoir de beaux longs cheveux brillants. Je n’ai par contre pas eu beaucoup de choix. Les fabricants et magasins de perruques dépendent de l’offre: si ­aucune blonde ne choisit de donner ses cheveux, il n’y a tout simplement pas de perruque blonde et encore moins avec de longs cheveux. J’ai finalement trouvé un modèle qui me convient très bien.

Quand j’ai porté cette perruque pour la première fois, c’est comme si je mettais derrière moi les soucis des dernières semaines et qu’une nouvelle vie commençait.

Qui est cette jolie fille?

J’étais très fière de mes nouveaux ­cheveux, mais j’ai surpris mes proches avec ce nouveau look. Certains ne m’ont pas reconnue. Un de mes amis à ­l’université a même demandé à une ­copine: ‘Qui est cette jolie fille?’ Il ne me connaissait qu’avec un foulard et ne m’avait pas du tout reconnue. Je me suis même amusée à aller surprendre mes copines au cours de danse, j’ai attendu que la musique s’arrête pour entrer dans la classe en criant: ‘Tadam!’ Il y a d’abord eu un long silence puis une de mes copines a crié: ‘C’est Gwen’ et là tout le monde m’a prise dans ses bras.

Réconfortant

Je n’ai aucun problème à parler de mon alopécie. Elle fait partie de moi. Je ne suis pas malade, je n’ai juste pas de ­cheveux. Je suis heureuse que ma ­perruque soit très naturelle et que les gens ne détectent pas tout de suite que mes cheveux blonds ne sont pas vrais. L’année dernière, j’ai travaillé en tant qu’animatrice pour un stage d’aventure. Le directeur m’a demandé si je ­souhaitais ou non en parler aux enfants. J’ai décidé de leur dire, car s’il faisait très chaud ou lors de certaines activités comme la piscine ou du rafting, je ­pourrais être amenée à ne pas porter ma perruque. Lorsque je l’ai dit aux ­enfants, ils ne m’ont pas crue, j’ai alors soulevé ma perruque. Ils ont été très surpris, mais adorables. Toute la ­semaine, ils ont voulu me toucher le crâne et ils trouvaient tous que j’étais mieux sans ma perruque. C’était ­réconfortant, ça m’a fait un bien fou.

Zéro complexe

Depuis que j’ai ma perruque, j’ai ­rarement été complexée ou mal à l’aise à cause de mon alopécie. En première et deuxième secondaire, j’ai été victime de harcèlement pendant un certain temps, mais cela n’avait rien à voir avec mes cheveux. Je manquais de confiance en moi, j’étais calme et ­timide, une cible facile. Aujourd’hui, je suis beaucoup plus à l’aise.

J’ai décidé que je n’aurais jamais honte de ma ­calvitie. Je suis de toute manière obligée de vivre avec elle.

Un jour, quand j’avais 13 ou 14 ans, je me suis disputée avec une fille de ma classe, elle s’est assise devant moi en secouant ses cheveux puis s’est retournée en disant bien fort: ‘moi au moins je ne perds pas mes ­cheveux’. C’était blessant. C’était juste à un ­moment où mon alopécie ­commençait à devenir visible, à cause de mes plaques chauves. J’étais très mal dans ma peau. Mes ­copains de classe m’ont soutenue à 100 % et m’ont ­souvent défendue. Ils m’ont beaucoup aidée et leur soutien m’a permis de ­renforcer ma confiance en moi. Ma meilleure amie, qui avait des problèmes de santé bien plus grave que ma perte de cheveux, m’a aidée ­aussi. Grâce à elle, j’ai pu relativiser.

Pas de sourcils

Depuis que j’ai perdu mes cheveux, mes cils et mes sourcils, je suis devenue beaucoup plus coquette. Je me maquille tous les jours. Quand j’ai des cils – parce qu’il arrive qu’ils poussent un peu – je mets du mascara et j’utilise un eye-liner. Mes sourcils, je les dessine chaque ­matin avec un crayon waterproof. Avant j’utilisais un simple crayon, mais le ­frottement de ma perruque ou quelques gouttes de pluie suffisaient à les effacer. J’aimerais me les faire tatouer, mais ma mère a peur que la technologie actuelle ne soit pas au point et que ça vieillisse mal. Je me renseigne tout de même sur les différentes techniques qui existent.

Les bons côtés

Pour le moment, il ne semble pas ­possible que je guérisse de cette ­alopécie, car aucun traitement n’est ­efficace à long terme. Il existe des ­traitements qui fonctionnent chez ­certains patients, mais pas chez tous. J’ai déjà essayé beaucoup de choses: des injections sous-cutanées sur chaque centimètre carré de mon crâne, en ­passant par toutes les crèmes et les gels, mais rien ne fonctionne. Quelqu’un m’a récemment demandé si je voulais que mes cheveux reviennent. Je ne sais pas.

Aujourd’hui, je vis très bien avec ma tête chauve et je vois les avantages que cela m’apporte au quotidien. Je ne dois jamais m’épiler, ni me laver les cheveux. Ma perruque tombe toujours parfaitement bien. Génial, non?

Qu’est-ce que l’alopécie ?

L’alopécie désigne la perte de cheveux, partielle ou totale. Il existe différentes formes d’alopécie, mais les deux plus courantes sont l’alopécie androgénétique et l’alopécie areata. L’alopécie ­androgénétique est la plus commune et concerne davantage les hommes que les femmes. C’est souvent un trouble ­héréditaire qui peut survenir à partir de la puberté. Cette forme d’alopécie est chronique, elle peut être momentanée ou permanente, dépendant des ­personnes atteintes. L’alopécie areata (ou pelade) est une calvitie irréversible: les cheveux sont tombés définitivement. Cette forme d’alopécie, qui est celle de Gwen, commence souvent par des plaques chauves sur la tête et peut ­affecter les cils et les sourcils, jusqu’à arriver à un stade où la personne n’a plus le moindre poil sur le corps ou cheveu sur le crâne. Il n’existe pas de traitement efficace à ce jour.

Texte : Lies Van Kelst et Amandine de Harlez. Photo : Tim De Backer.

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