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Noël en septembre - Getty Images
Noël en septembre - Getty Images

FAUT QU’ON PARLE: pitié, arrêtez avec la Noël avant Halloween

Kathleen Wuyard

La Noël, pour celles et ceux qui vivent à fond sa magie, c’est probablement une des périodes les plus agréables de l’année, et vraiment, on voudrait qu’elle ne s’arrête jamais. Sans pour autant désirer qu’elle commence en même temps que la rentrée des classes.

Car oui, on en est là désormais, et début septembre, les grandes chaînes spécialisées dans la vente d’accessoires et articles de déco (ainsi que quelques supermarchés et petites boutiques) proposaient déjà, en marge des rayons “retour à l’école”, des décorations d’Halloween six semaines à l’avance mais aussi et surtout une percée carrément prématurée des décorations de Noël. Pour prolonger la magie? Peut-être que c’est l’effet désiré, mais dans les faits, on assiste plutôt à une dilution en règle de tout ce qui fait que ces quelques semaines de décembre où le sapin brille à notre fenêtre sont une source de réjouissance pour les onze mois qui restent.

Et il ne s’agit pas ici des ronchonneries d’un Grinch: j’adore la Noël. Adore, adore, adore. Sur une échelle de 1 à “Famille américaine qui recouvre sa maison entière de loupiotes qui clignotent”, je me situe à un solide 8.5: mon sapin est installé dès le 1er décembre au plus tard, mon pèlerinage annuel à l’autel de “Love Actually” est immuable, j’ai un pull de Noël que je porte de manière non-ironique (pas pour sortir de chez moi tout de même, il ne faut pas abuser) et je commence à penser aux cadeaux que j’ai envie d’offrir à mes proches dès le 26 décembre de chaque année. Bref: J’ADORE LA NOËL au point de le clamer haut et fort à l’aide de gras ET de Capslock. Ce qui ne veut pas dire que l’arrivée des décorations en rayon dès les prémices de l’automne ne me déprime pas, au contraire.

Trop de magie tue la magie de Noël

Si je devais mettre le doigt sur la raison de ce malaise (et je dois le faire puisque j’ai commencé à rédiger cet article), je dirais que c’est lié au fait qu’une bonne partie de la magie de Noël tient justement dans le fait que la période est concentrée sur trois à quatre semaines, cinq si comme moi vous n’arrivez pas à vous résoudre à enlever votre sapin avant début janvier.

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On passe des jours/semaines/mois à se réjouir, et puis enfin, décembre arrive, amenant avec lui guirlandes lumineuses, boules qui scintillent, tables chargées de délices et chants de saison qu’on écoute en boucle (presque) sans se lasser. La période est irrémédiablement associée aux joues rosies par le froid, à l’odeur incomparable de la nuit qui tombe en hiver et au parfum des châtaignes et du vin chaud qu’on s’offre à chaque coin de rue, bref, magie.

Une magie qui opère tout de suite nettement moins quand le scintillement des boules est terni par celui du soleil et que la simple vision de gigantesques chaussettes fourrées à remplir de petites surprises donne un coup de chaud parce qu’on est en t-shirt et qu’il fait 23 degrés. Pour utiliser une analogie bien de saison elle aussi, c’est un peu comme quand, enfant, on trépignait à l’idée de la venue imminente de Saint-Nicolas: si, comme moi, vous aviez beaucoup de chance (merci maman si tu me lis), vos parents vous enjoignaient à mettre vos pantoufles chaque soir devant la fenêtre dans les semaines qui précédaient “au cas où” le grand Saint aurait décidé de vous spoiler avant le 6 décembre. Avec, chaque matin (sauf les lendemains de jours où vous n’aviez pas été sages, huhuhu) une petite surprise sucrée au réveil: c’était délicieux, ça faisait chaud au coeur au moment de la manger à la récré, mais si l’autorité parentale avait assuré le service 11 mois sur 12, il y a fort à parier que la joie suscitée par l’exploration des pantoufles aurait grandement diminué – et qu’il y aurait potentiellement eu un diabète de type 2 à la clé.

En allongeant la période de Noël le plus possible et en commençant le décompte dès la mi-septembre, on ne prolonge pas la magie, on se contente simplement de la diluer. Et accessoirement, la démarche met tristement en lumière l’aspect de plus en plus consumériste des fêtes de fin d’année. Bien sûr que choisir minutieusement les cadeaux qu’on va offrir aux personnes qu’on aime fait (énormément) partie du plaisir, tout comme la joie de voir leurs yeux qui brillent au moment du déballage et de se dire qu’on a tapé dans le mille. Mais tout ce déballage de décorations à outrance (qui a vraiment besoin d’une quinzaine d’accessoires différents pour dresser une table de fêtes? Combien de boules peut-on accrocher à un sapin avant que ses aiguilles ne deviennent invisibles?) éclipse tout l’amour qu’il y a derrière les achats de Noël pour ne mettre en lumière que le côté transactionnel que peut avoir cette fête: acheter de quoi gâter ses proches et se mettre dans l’ambiance, d’accord, mais peu importe combien on dépense, la magie des fêtes est immatérielle et n’a pas de prix.

Je réalise que si ces décorations de saison font leur arrivée toujours plus tôt en rayon, c’est parce qu’il y a une demande, et il est hors de question ici de juger celles et ceux pour qui c’est Noël (presque) toute l’année: voire même, au plus fort de novembre, un des mois les plus meh de l’année si on est honnêtes, je me prendrai à rêvasser à une invitation dans une de ces maisons où les décorations sont déjà accrochées et où on peut noyer son chagrin dans la cannelle. Mais très sincèrement, quand je vois déjà à quel point “Driving Home for Christmas” finit par m’irriter le tympan aux alentours du 22 décembre, je me demande comment ils font. À moins que ce soit plutôt “Last Christmas” qu’ils écoutent en boucle, auquel cas, d’accord, même en plein mois d’août.

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