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Quand des gynécologues comparent des femmes à des juments (et nient les violences obstétricales)

Kathleen Wuyard

On pourrait penser que leur métier confère aux gynécologues un respect tout particulier envers les femmes, et pour beaucoup, c’est le cas. Mais pas tous, visiblement: lors de la 42e journée nationale du Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF), l’un d’eux a cru bon de comparer les femmes aux juments. Au programme également de la journée: une conférence sur “ces prétendues violences obstétricales”.


“Les femmes c’est comme les juments, celles qui ont de grosses hanches ne sont pas les plus agréables à monter, mais c’est celles qui mettent bas le plus facilement”. La phrase pourrait sortir de l’arsenal de “blagues” d’un bon beauf’ misogyne, mais elle est en réalité tirée du roman historique d’Yves Aubard, “Le seigneur de Châlus”. Lui-même gynécologue et auteur à ses heures, il a dû être plutôt surpris de se trouver au coeur d’une polémique sexiste suite à la 42e journée nationale du Collège national des gynécologues et obstétriciens français. C’est qu’un de ses confrères a cru bon de projeter la phrase lors de sa présentation, et qu’à l’ère des réseaux sociaux, ce genre de gaffe ne pardonne pas. Aussitôt photographiée et largement diffusée, la diapositive (et surtout, la phrase qui y est écrite) a suscité une vague de colère, femmes et hommes compatissants s’empressant de dénoncer cette comparaison sous le hashtag #jenesuispasunejument.


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Propos méprisants, ou simple maladresse d’un médecin qui a tenté (et raté) de mettre un peu d’humour dans une journée autrement tout ce qu’il y a de plus sérieuses? Bien que les tribunaux d’internet, qui jugent à grands coups de commentaires, penchent pour la première option, il y a fort à parier qu’il s’agisse d’une malheureuse tentative d’humour. Ce qui n’a pas empêché la CNGOF de présenter des excuses officielles.

Sortie de son contexte, elle peut faire croire que celui qui l’a présentée en valide le sens, ce qui n’est pas le cas. Nous sommes navrés, nous qui sommes réunis pour améliorer nos pratiques professionnelles, de ce qui -à tout le moins- est considéré par nous comme une atteinte à l’image des femmes.


Et d’ajouter que “toute notre profession est arc-boutée sur la défense des femmes, de leur santé et de leur dignité”. Une déclaration louable, toutefois contredite par le programme de la journée. Car tel celui qui regarde le doigt plutôt que la lune, il semblerait que ceux qui se sont indignés contre la comparaison perçue entre femmes et juments aient loupé le véritable problème. Insérer une citation de mauvais goût dans un slide est une chose, mais programmer une conférence sur “ces prétendues violences obstétricales”, par contre?

C’est pourtant ce qui s’est produit, un talk sur les enjeux juridiques des “prétendues violences obstétricales” étant prévu en matinée. S’il est possible de concevoir que le concept soit difficile à avaler pour les gynécologues, qui voient les violences en question comme un moyen nécessaire pour faire leur métier, soit mettre au monde des bébés en bonne santé, les nier va totalement à l’encontre de la dignité des femmes que la CNGOF prétend pourtant défendre. D’autant que le Collège national des gynécologues et obstétriciens français est bien au fait de ces violences puisqu’en juin 2017, le gynécologue Israël Nisand, qui a présenté les excuses du Collège concernant la phrase sur les juments, avait admis que les violences obstétricales étaient le fait de “brebis galeuses” et qu’il était important que les femmes qui en étaient victimes portent d’avantage plainte. Un message que ces dernières ont bien entendu, s’il faut en croire la vague de mécontentement sur les réseaux sociaux ces derniers jours.

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