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© May 16 2018 - Vatican City State (Holy See) POPE FRANCIS during his wednesday General Audience in St. PeterÕs Square at the Vatican. PICTURE NOT INCLUDED IN THE CONTRACT ! Only BELGIUM !

Non, Pape François, l’avortement n’équivaut pas à ““recourir à un tueur à gages””

Kathleen Wuyard

La religion, quelle qu’elle soit, apporte beaucoup de bonheur à beaucoup de gens, alors on ne juge pas. Par contre, vraiment, on aimerait que les leaders religieux, quels qu’ils soient, s’abstiennent de commentaires sur des affaires qui ne les regardent absolument pas. Par exemple, ce que les femmes font de leurs corps. Oui, Pape François, c’est toi qu’on vise.


On se permet le tutoiement, tu ne nous en voudras pas: tu te permets bien d’émettre des jugements catégoriques sur une foule de sujets, dont nos corps, alors on se dit qu’on peut bien se tutoyer. Donc, Pape François, pardon, mais tu racontes n’importe quoi. Pas tout le temps hein, ça, on ne se permettrait pas. Mais hier, lors de ton homélie place Saint-Pierre, tu as salement dérapé. Attends, on te cite pour te rafraîchir la mémoire.

Interrompre une grossesse, c’est comme éliminer quelqu’un. Est-il juste d’éliminer une vie humaine pour résoudre un problème ? Ce n’est pas juste de se débarrasser d’un être humain, même petit, pour résoudre un problème. C’est comme avoir recours à un tueur à gages pour résoudre un problème.


Tu vois, ça, c’est pile le genre de discours qui nous fait avaler notre hostie de travers. Et parce qu’on croit fondamentalement en la possibilité de rédemption, on va t’expliquer pourquoi point par point, plutôt que d’invoquer l’Esprit sain.

“C’est comme éliminer quelqu’un”


Sur le principe, là, on ne peut pas argumenter avec toi. Oui, au final, il y a dans les deux cas une vie qui prend fin. Sauf que bon, tu dois quand même reconnaître que comparer un avortement à 3 semaines avec le meurtre en pleine rue d’un adulte de 45 ans, c’est un peu malhonnête, non? Pour tout te dire, à 3 semaines, un foetus n’a pas encore de système nerveux ou de cerveau développé, contrairement aux animaux que tu manges. Avoue, c’est un peu hypocrite, non, de parler de meurtre pour des organismes longs d’un millimètre et de ne pas condamner pour autant la mort des animaux destinés à l’alimentation? On ne veut pas dire, mais au catéchisme, on nous apprenait que Dieu aime également tous ses enfants. Autrement dit, ta sélectivité réactionnaire est difficile à avaler. Et si tu veux notre avis, tu ferais bien de la ravaler.

“Résoudre un problème”


Marrant hein, on ne te connaît au final pas si bien que ça, mais à lire cette remarque, on pourrait jurer que tu n’as jamais du avorter. Parce qu’en fait, tu vois, il y a vachement peu (pas?) de femmes qui abordent ça avec autant de nonchalance. Jeter un bas filé à la poubelle, oui, limer en urgence un ongle cassé, oui, tout ça, d’accord, c’est se débarrasser de problèmes. Mettre fin à une grossesse potentiellement désirée (par manque de moyens ou de possibilités d’élever le bébé) ou non désirée, parce que la mère a été violée par exemple, on n’appelle pas ça exactement “résoudre un problème”, enfin si, mais ce n’est pas comme ça qu’on le voit. Tu vois, Pape François, l’avortement, c’est avant tout une histoire de miséricorde, un concept que tu connais bien, à ce qu’il parait. De la miséricorde envers les mères, qui ne font jamais ce choix de gaieté de coeur, quoi que tu puisses en penser. Et puis de la miséricorde envers ces bébés à naître. Parce que tu sais, grandir sans père, dans la pauvreté, avec une mère incapable psychologiquement et/ou financièrement de prendre soi de toi, avec un handicap si sévère qu’on doit être branché H24 à des machines... Tous ces scénarios, on ne les souhaiterait pas à notre pire ennemi. Et bon, ok, on lui parle moins souvent que toi, mais on a du mal à imaginer que Dieu, ce fameux être de miséricorde, souhaite ça à qui que ce soit.

“Se débarrasser d’un être humain”


Tu veux dire quoi par “être humain”, au fait? Un être capable d’aller à la messe? Parce que bon, déjà pour une flopée d’adultes, bof, mais sans vouloir te vexer, un foetus est tout bonnement incapable d’assister à tes homélies. Déjà parce que pendant une bonne partie de son développement, il n’a pas de cerveau développé. On peut vraiment parler d’être humain, pour toi, sans système nerveux, sans cerveau, avec un coeur qui ne fonctionne pas tout seul? Avoue, alors, ça veut dire que les robots sont des êtres humains aussi. Imagine un peu la tête de tes fidèles si tu leur racontais ça! En l’occurence, c’est nous qui en tirons une drôle, de tête, à t’entendre t’opposer encore et encore contre l’avortement. D’abord, parce que pardon, mais ce n’est pas tes affaires. Ensuite, surtout, parce que s’entêter à pousser des femmes à mettre au monde des enfants qui n’ont aucune chance dans la vie (à cause d’handicaps physiques, psychologiques, ou liés à leurs conditions familiales) ben en fait, c’est cruel. Ne nous dis pas que tu es CRUEL quand même Pape François?!

“Avoir recours à un tueur à gages”


Là, pardon, mais on te trouve un peu malhonnête. Peut-être que tu parles de ces faiseurs d’anges clandestins, qui tuent le bébé, et souvent la mère avec. Des mères qui justement, sont contraintes d’aller les voir à cause de remarques comme les tiennes, qui font que dans nombre de pays, des avortements en toute sécurité sont encore interdits. Alors oui, dans ce cas, tueurs à gages, mais avec ton sang sur leurs mains aussi. Si tu parles de ces médecins et soignants, et ils sont encore trop rares malheureusement, qui font tout pour encadrer les femmes qui veulent avorter avec compétence et dignité, alors non, vraiment, ta métaphore est injuste et beaucoup trop forte. Comparer un gynécologue en charge d’un avortement à un tueur à gages, c’est comme de dire que toi, tu es un diseur de bonne aventure. Après tout, tu portes bien des costumes élaborés, et tu te bases sur des préceptes difficiles à prouver pour émettre des opinions. Tu ne serais pas content, si, si on disait que tu n’étais rien d’autre qu’un diseur de bonne aventure? Peut-être même que tu dirais que c’est hérétique. Un peu comme un spécialiste de la religion, abstinent et qui plus est doté d’un zizi, qui viendrait dire à des femmes actives sexuellement comment agir. Une véritable hérésie, oui.

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