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© Getty Images

JOURNÉE DU DEUIL PÉRINATAL: il y a un an, j’ai perdu mon petit garçon à 6 mois de grossesse

Cette journée du deuil périnatal me ramène à ce vide immense que mon enfant a laissé dans ma vie. Encore tabou dans notre société, la mort d’un tout-petit nous concerne pourtant toutes et tous. Car sans le savoir, nous connaissons sûrement une personne affectée de près ou de loin par ce terrible drame.

 


Malgré cette omerta, j’ai ressenti un besoin immense et vital d’en parler. Parce que raconter c’est transmettre une histoire et donner vie à ce qui pourrait sinon tomber dans l’oubli.

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J’ai accouché de mon enfant né sans vie le 26/09/2019. Je me rappelle de cette journée comme si c’était hier. Je peux encore sentir le chagrin, la colère, le manque et le vide qu’il a laissé derrière lui. 365 jours. Un an qu’il est parti. Un an que je lui ai dit bonjour et au revoir en un court instant. Je regrette tant de ne pas l’avoir câliné davantage. J’aimerais le revoir, le sentir, le renifler, le regarder, le porter, le border, l’embrasser. Que le temps est passé vite, j’ai l’impression qu’hier encore, il bougeait et vivait en moi.

 

Il m’aura fallu du temps pour arriver à prononcer son nom. Au début, rien que de l’entendre m’arrachait les tripes. Et puis j’ai réussi à troquer « le bébé » contre Eliott. Et à vouloir de plus en plus le dire, sans cesse, parler de lui, ne pas l’oublier, car il est bien là malgré son absence si présente dans ma vie. J’ai besoin de parler de lui, de dire son nom, de lui donner vie, encore et encore.

 

Le monde a continué de tourner. Les feuilles sont tombées, le froid est arrivé et puis la vie a repris. Oui, la vie a continué. Les fleurs ont poussé, l’été est arrivé, avec la chaleur, les rires, la légèreté, la futilité. Les sorties, les verres, les dîners.

 

J’ai cru que je n’arriverais pas à me relever, que je ne m’en remettrais pas. Et puis pourtant, le temps guérit bien les blessures. La douleur insupportable des premiers jours devient moins invivable. On arrive alors à dormir, à parler et même un jour à rire. Et puis les semaines et les mois passent et on retrouve un semblant de vie. Je ne guéris pas de lui mais je me soigne. Je sais vivre sans lui, je sais accepter l’impensable, me résilier.

 

Depuis un an, je dois affronter les naissances de bébés autour de moi, offrir des cadeaux, féliciter, voir des nouveau-nés. Encore aujourd’hui, c’est trop douloureux. Certaines personnes de mon entourage l’ont compris. D’autres non.

 

Je n’aime pas qu’on dise de moi que je suis une mam’ange ou une maman. Car je ne me sens pas maman. Une maman borde, allaite, rassure, apaise, berce, endort, réveille, habille, déshabille, change, lit, rit, raconte, embrasse. Je ne fais rien de tout ça. Et pourtant, quand on me demande si j’ai des enfants, je reste souvent pantoise. Dois-je parler de mon enfant ou dois-je le taire au risque de choquer, de mettre mal à l’aise, ou pis, de recevoir pour réponse “ce n’était pas un enfant“. Mais le taire m’est insupportable car j’ai l’impression d’insulter mon bébé.

 

En ce jour particulier qu’est la journée du deuil périnatal, une amie chère à mon cœur m’a écrit ces mots :

 

En cette journée, j’ai envie de célébrer ta force, ton courage et ta pugnacité, croire enfin à de meilleurs lendemains”.


 

Ces mots ont résonné en moi. Car depuis la mort de mon enfant, je réalise que je suis une autre personne. Mon enfant m’a appris ce qu’était l’amour, la résilience, le courage, l’échec, la mort, l’espérance. Ce drame m’a rendue courageuse. Moi qui avais peur de tout, qui m’arrangeais toujours pour fuir mes responsabilités et être traitée comme une enfant, je me suis retrouvée la seule à pouvoir le câliner les jours qui ont précédé sa fin, la seule à pouvoir accoucher de mon enfant sans vie, la seule à pouvoir souffrir durant 34 heures, la seule à préparer ses petites affaires, à lui trouver un pyjama dans lequel j’avais collé des étiquettes avec son nom, la seule à lui faire un coffre pour y glisser ses affaires. Dans ce drame, j’ai eu la révélation: je suis courageuse et je ne baisserai jamais les bras.

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