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Liseuse électronique - Getty Images
Liseuse électronique - Getty Images

Comment une liseuse électronique m’a (presque) rendue infidèle

Kathleen Wuyard

Il n’y a pas si longtemps encore, j’étais entièrement dévouée aux livres de papier, adorant autant les lire que les accumuler, comme autant de beaux objets racontant chacun bien plus que l’histoire écrite sur leurs pages. Mais ça, c’était avant que je ne reçoive une liseuse électronique.

Pourtant, j’aurais pu jurer que jamais ô grand jamais je ne renierais mon allégeance aux livres, les vrais, ceux avec des mots, des pages, du papier, des jolies couvertures cartonnées. D’ailleurs, à la rédac’, quand Julie, notre responsable web, avait parlé de sa passion récente pour sa liseuse, j’avais roulé des yeux. Elle avouait avoir longtemps résisté, convaincue de l’infinie supériorité des livres de papier, avant de craquer et de réaliser que les livres électroniques, et plus précisément la capacité de transporter une bibliothèque entière dans un engin ne pesant pas plus de 300 grammes. Plus elle enchaînait les arguments en soulignant son statut d’ancienne inconditionnelle des livres, plus moi, je me disais que “Julie”, si on reportait 3 lettres, ça faisait “Judas”. Abandonner le plaisir de tourner les pages, plier des coins (je sais, pas bien) et avoir une véritable bibliothèque débordant de livres colorés? No way. Et puis la Noël est arrivée, et avec elle, une liseuse électronique.

Addiction immédiate

Une petite merveille compacte, bien plus petite que ma iTablette qui s’avérait surtout iMpossible à manoeuvrer confortablement pour lire au lit, et donc une iMmense perte d’argent, sachant qu’il m’avait à l’époque fallu des mois pour trouver comment me désabonner à mon service de librairie en ligne. Mais je digresse. Une jolie petite liseuse compacte et ultra légère, donc, sur laquelle je me suis empressée de télécharger un livre dès que je l’ai déballée. C’est vrai, après tout, je venais justement de finir un livre (papier), donc avant d’en entamer un autre, rien de tel que de me blottir près de mon mec et tester un peu ce nouvel objet. En dix jours seulement, j’ai dévoré 3 livres, tous électroniques, et je n’ai pas touché un seul des romans qui attendaient sagement en pile sur ma cheminée que je les commence.

La liseuse, une idée lumineuse

Finies, les crampes aux doigts et le bras endolori par mes contorsions pour trouver une position confortable pour lire au lit: ici, même les ouvrages les plus imposants tiennent dans la paume. Bonus, en prime: grâce au rétroéclairage délicat, je lis sans me faire mal aux yeux (adieu, lumière bleue) et je ne garde pas Chéri éveillé en lisant sans lampe de chevet allumée. Hier encore, je jurais qu’on ne m’y prendrait jamais, et là, soudain, j’avais rejoint les hordes de convertis qui chantent les louanges des liseuses et entreposent une véritable bibliothèque dans un petit bout de plastique. Mais si c’est si génial, pourquoi est-ce que je me sentais mal?

Esprit de Matilda, es-tu là?

Comme dans toute addiction, les effets positifs ont évidemment un revers et se paient en effets négatifs aussi. Ici, en l’occurence, je me sentais infidèle. Ne parlons même pas du fait que j’ai un temps complètement délaissé la pile de livres qui hier encore me faisait les yeux doux depuis la cheminée susmentionnée et à qui je battais des cils avec anticipation en retour. Ni de la triste réalité de mes libraires habituels, qui devaient se dire que telle Ariana G., j’avais fini 2018 en mode “thank you, next” et tourné la page sur notre relation épanouie (et un peu ruineuse pour moi aussi). Non, la pire trahison je crois, celle que j’avais le plus de mal à digérer, c’était envers mon mini-moi, cette lectrice compulsive de Roald Dahl qui, dès l’instant où elle a dévoré Matilda il y a des années, s’était complètement et totalement identifiée à cette accro aux livres, la famille baltringue en moins.

Sauf que bon, c’était siiiiiii pratique. Et tellement plus écologique, aussi, que toutes ces pages qui s’entassaient dans ma bibliothèque comme autant d’arbres morts. Malgré mon inconfort, j’aurais pu rester du côté obscur (ou lumineux, ça dépend, la luminosité des liseuses est réglable!) de la force si le premier confinement n’étais pas arrivé, amenant dans son sillage une furieuse envie de déconnection. Oui, même de ma liseuse sur laquelle techniquement, personne ne savait me téléphoner ni m’envoyer de mails: sus aux écrans. D’ailleurs, un milliard (ou presque) de confinements plus tard, cette dernière a rendu l’âme et n’a pas été remplacée. J’ai retrouvé le plaisir du papier, mais sans la culpabilité: désormais, j’assume complètement la Matilda qui sommeille en moi en m’organisant des virées mensuelles à la bibliothèque, avec deux totes bags prêts à être remplis en guise de chariot rouge à roulettes (les vrais savent). Certes, ça fait un peu mal au dos à ramener, toutes ces pages qui pèsent, mais ça fait du bien au coeur de retrouver le plaisir du papier. Disons que les livres et moi vivront heureux et partageront beaucoup d’histoires ensemble. Fin. Ou suite au prochain chapitre?

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