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© Getty Images

Que nous réserve l’année 2022 selon les experts?

La rédaction

Qu’apportera l’année 2022 en termes de fêtes, de mode et de société?Après deux ans de déception, nous osons à peine avoir des attentes. Nous avons donc laissé les experts regarder dans leur boule de cristal.

Conclusion: l’an 2022, ce ne sera peut-être pas foufou, mais ça ira mieux. Ouf!

Aurons-nous enfin droit à la fête de libération tant espérée?

« Le sentiment d’euphorie que l’on attendait s’est quelque peu étiolé », affirme le sociologue culturel Walter Weyns. « Une véritable libération supposerait que la situation change du jour au lendemain, comme après une guerre. Qu’un beau matin, vous vous réveilliez dans un monde où les restrictions n’existent plus et où vous pouvez reprendre votre vie. L’illusion que cela va se produire a disparu. Nous devons apprendre à vivre avec le Coronavirus». Mais l’année 2022 sera meilleure que les deux années précédentes. « On parle toujours du vaccin, mais maintenant il existe aussi des médicaments contre le Coronavirus. C’est un autre moyen sérieux, avec le vaccin, de stopper le virus. L’année prochaine ne sera pas autant affectée que les deux dernières années par la Covid. »

Mais peut-on encore être optimistes après tant de déception? « Tout comme le virus, notre état d’esprit se déplace par vagues. Lorsque les chiffres s’amélioreront, nous croirons à nouveau que le pire est derrière nous. Et ce sera le cas. À terme, la Covid ne sera plus un boulet au pied de la société, mais deviendra supportable. »

Retour aux années 70

À cette période de l’année, on demande traditionnellement à l’observateur de tendances Tom Palmaerts de Trendwolves à quoi ressemblera l’année à venir. Il se souvient de la réponse qu’il a donnée l’an passé, et la répète plus ou moins pour 2022. « Tout le monde parle des années folles, de la fête et de l’exubérance, mais j’ai des réserves à ce sujet. Tout d’abord, parce qu’à côté de ceux qui ont très envie de refaire la fête, il y a aussi ceux qui ont peur, et également ceux, très nombreux, qui ont découvert grâce aux confinements que tous ces contacts sociaux étaient inutiles pour eux. Beaucoup de gens réalisent aujourd’hui qu’une soirée à la maison, c’est OK. De plus, il faut de l’argent pour l’exubérance et la débauche des années folles. Sur le plan de la consommation, nous devrions connaître une belle année 2022, au cours de laquelle l’économie belge se portera bien. Mais en même temps, les personnes qui ont déjà des difficultés financières auront encore plus de problèmes. Il suffit de regarder les prix de l’énergie, l’inflation… À la place des années 20, je regarderais plutôt du côté des années 70.

Au Royaume-Uni, il y avait à cette époque une mentalité de ras-le-bol vis-à-vis du gouvernement, en raison de la hausse du chômage. La musique punk exprimait ce sentiment, ce genre de musique grandissait en force. Aujourd’hui, ce type de sentiment prédomine, surtout chez les jeunes. C’est dû à la crise climatique, mais aussi à la manière avec laquelle ils ont été traités pendant la crise de la Covid. Il faut se mettre à la place d’un jeune de 16 ans qui a passé une grande partie de sa jeunesse en période de Corona. Cela crée un esprit de rébellion.

La popularité de Måneskin s’inscrit parfaitement dans ce tableau.
L’année dernière, j’ai fait, je pense, la meilleure prédiction de ma carrière: le retour d’Abba (rires). Je ne pensais pas que le groupe reviendrait vraiment, mais bien le style disco, cette pop seventies qui fait du bien. Et c’est ce qui s’est passé: Abba est très populaire parmi les jeunes. Je pense
qu’il est plus probable que nous fassions un retour vers les années 70,
avec un sentiment croissant de protestation, et en même temps une
recherche sur comment nous sentir mieux. Bien sûr, il y aura une grande
exubérance quand tout se relâchera à nouveau, et cela pourra faire penser aux années folles, mais la question est de savoir combien de temps ça va durer. »

La ruée, phase 2

Dans les boîtes de nuit et le monde de l’événementiel, une sorte de
période « années folles » a débuté, mais cette grande fête a été de courte durée. Nelson Donck, organisateur d’événements et propriétaire d’une boîte de nuit, a remarqué une forte exubérance dans le public, qu’il espère voir revenir en 2022. « Quand tout s’est ouvert, il y a eu une véritable ruée sur les billets.» Mais l’entrepreneur reste terre à terre par rapport à cet engouement. « Je pense que cela va s’atténuer et se stabiliser rapidement.»

La prédiction de Nelson Donck pour 2022? Une saison de festival extra longue. « Avant, il n’y avait des festivals qu’en été. Ces dernières années, le début de la saison a commencé à changer. Je pense que 2022 sera atypique.» Mais le jeune homme a aussi de moins belles prédictions. « Je croise les doigts pour certains de mes collègues. Les boîtes de nuit traditionnelles vont avoir beaucoup de mal. Je ne sais pas s’il est encore rentable en 2022 de se greffer sur une seule activité et de ne faire son chiffre d’affaires que le vendredi et le samedi entre 23 h et 6 h du matin. Avec notre boîte de nuit, par exemple, nous avons également un restaurant et des terrains de padel. Il y aura toujours des boîtes de nuit traditionnelles, mais je doute qu’il y en ait encore dix par ville. »

Les deux années écoulées vont se ressentir dans l’avenir, estime-t-il. « La crise a gravement porté atteinte à la crédibilité de notre secteur. La question est de savoir si les fournisseurs et les clients veulent encore travailler avec un secteur qui semble si incertain. Beaucoup de gens sont partis avec leur savoir-faire, et les nouveaux seront moins enclins à se lancer dans l’événementiel et la culture. Je crains pour notre avenir. »

La mode micro-mini

Le monde de la mode a aussi lancé l’expression des années folles l’an dernier, mais il est devenu plus prudent aujourd’hui, précise notre
journaliste mode, Catherine Kosters.

« Même si l’accent des collections de 2022 est mis sur les sorties, les fêtes et les voyages. L’ère de la mode Zoom-confort est définitivement révolue. » Les jours cosy appartiennent au passé: le monde de la mode fait même revenir le taille basse. « Une des tendances les plus discutées pour 2022 est la micro-mini », explique Catherine. « C’est une minijupe extrêmement courte qui se porte très basse, de sorte que l’on peut voir les os pelviens. Beaucoup de gens trouvent ça horrible, parce que ce n’est pas portable, mais cela s’inscrit pile dans la tendance des années 2000. La tendance fait le buzz via TikTok et les créateurs s’empressent de miser dessus. Mais pas de panique, l’an prochain, il n’y aura pas que des tailles basses en magasins (rires). »

Le retour du taille basse n’est pas la seule nouvelle inquiétante de la fashion week. « On a constaté que de nombreuses tendances pour l’année prochaine sont basées sur une image du corps démodée, à savoir très maigre. Certains journalistes ont écrit qu’il y avait bien moins d’inclusivité que les années précédentes. Vous remarquez que l’expression ‘Body Positive’ n’est plus à la mode. Pareil pour la ‘durabilité’. Il y a des marques qui persévèrent, comme Chromat et Collina Strada, mais il y a aussi des créateurs qui reviennent à un casting de modèles très minces et blanches, comme dans le passé. J’espère qu’il y aura un contre-pied à cela. »

Heureusement, la durabilité reste un enjeu pour les enseignes de mode en 2022. « Elles s’investissent dans le domaine de l’écologie, avec le groupe H&M comme pionnier. Les gens achètent souvent des bottes vegan en faux cuir, mais elles sont fabriquées à base de plastique, ce qui n’est pas bon pour la planète. C’est très cool de voir que des alternatives apparaissent, comme le vegea, un cuir fabriqué à base de peau de raisin.»

De son côté, Catherine sait ce qu’elle laisserait derrière en 2021. « Pour moi, les marques de super fast-fashion comme Shein peuvent disparaître. Je comprends que l’on puisse être heureuse avec une jupe à 5 euros quand on a un budget limité, mais dans notre pays, il y a tellement de chouettes magasins vintage et de boutiques en ligne. On peut aussi y trouver de belles pièces à petit prix, et c’est bien mieux pour la planète. »

TikTok reste Roi

Hannes Coudenys, expert en médias sociaux, prévoit l’arrivée d’une nouvelle expérience shopping en 2022. « En regardant l’Asie, on peut voir ce qui nous attend au niveau numérique. En Asie et en Amérique, le livestream shopping est déjà bien installé. Un influenceur se met en direct sur Instagram, Facebook ou TikTok, et ses followers peuvent acheter sa tenue directement, en cliquant dessus.»

TikTok a connu sa grande percée lors du premier confinement, il y a presque deux ans maintenant. « 2022 sera toujours l’année de TikTok. Nous sommes au milieu de l’ascension de cette appli et le sommet est encore loin d’être atteint.»

Mark Zuckerberg a déjà annoncé un nouveau venu pour 2022: Metaverse. «L’idée est que vous mettiez des lunettes de VR (réalité virtuelle, ndlr) sur votre nez et que vous vous rendiez à des fêtes, des réunions et autres événements avec la version digitale de vous-même. C’est une évolution passionnante, car elle crée un espace pour développer, par exemple, la mode digitale. Il existe déjà des designers qui créent des vêtements spécialement pour des avatars en ligne. Sur Fortnite, par exemple, vous pouvez acheter des ‘vêtements’, appelés skins, de Balenciaga. D’un autre côté, je trouve effrayant que Facebook veuille nous sortir du monde réel. Cela reste une expérience solo. Une soirée ensemble n’est plus agréable avec ce truc sur la tête. La réalité virtuelle est amusante pour s’évader, mais j’espère qu’elle ne remplacera pas les contacts sociaux réels. »

En tout cas, nous ne sommes pas prêt·e·s à lâcher le smartphone, estime Hannes. « Nous passons toujours plus de temps sur les médias sociaux et sur d’autres applis. Par exemple, beaucoup de jeunes utilisent aujourd’hui une app’ pour se faire livrer leurs courses par des coursiers à vélo. Vous avez déjà vu le film Wall-E? Il se déroule dans le futur. Les gens ne sont plus actifs, ils sont allongés et tout leur est apporté par des robots. Une bonne prédiction de la part de Disney (rires)? »

Pas de grosse orgie

Quiconque a vu Gatsby le magnifique, sait que les années folles sont synonymes de fêtes extravagantes, de mode glamour et…d’orgies gigantesques. On n’en attend pas moins de l’ère post-Coronavirus.
Le besoin de contacts sociaux accumulé est censé pousser les célibataires à se jeter les un·e·s sur les autres comme des bêtes sauvages dès qu’ils ou elles le peuvent. Mais est-ce vraiment le cas? Elisabeth Timmermans, experte en rencontre, en doute.

« Notre sexualité est liée à ce qui se passe dans la société. Après la Seconde Guerre mondiale, les jeunes hommes se sont faits rares, si bien que les femmes officialisaient rapidement leur relation dès qu’elles en avaient une. Dans les années 60, il y avait les hippies avec l’amour libre, mais dans les années 90, ça a encore changé. Le sida suscitait des inquiétudes, les gens voulaient un partenaire qui ne couche pas avec n’importe qui d’autre. Au cours des dernières décennies, l’idée de sexfriends et de coups d’un soir est devenue plus ou moins la norme, en partie grâce à ce que nous voyons dans les films et les séries. La Covid pourrait, d’après moi, marquer un autre tournant. Ce n’est peut-être pas une MST, mais c’est un virus contagieux. Il y a même eu des articles sur les positions sexuelles qui sont coronaproof (rires). Je ne sais pas à quel point c’est vrai, mais vous remarquerez que les gens s’en préoccupent. Cette prudence a fait son retour dans notre société, et je ne sais pas si nous pourrons nous en débarrasser facilement. De plus, je doute que les gens aient un tel besoin de sexe occasionnel. Mes recherches auprès des étudiants démontrent qu’ils pensent souvent que leurs pairs ont beaucoup plus d’aventures sexuelles qu’eux. Nous pensons que les jeunes ont beaucoup de relations sexuelles occasionnelles, mais il faut voir si c’est vraiment le cas. »

Les célibataires n’ont jamais été confronté·e·s autant à leur célibat que pendant les confinements. Cela a des conséquences. « D’après une étude
que nous avons menée, la Covid augmente la peur d’être célibataire. Il apparaît aussi que les personnes qui ont peur d’être célibataires ont tendance à choisir un partenaire physiquement moins attrayant. Ils deviennent moins sélectifs au niveau de l’apparence. »

Plages et cocotiers

Quelle que soit l’évolution du Coronavirus, 2022 sera une bonne année pour les voyages, estime l’experte en voyage Britta Baeke. « Les gens savent désormais qu’ils peuvent voyager en toute sécurité, et ils recommencent à le faire. La jeune génération en particulier, a très envie de voyager. Nous ne sommes encore qu’à 50 % de la normale, mais je vois que cela ne fera qu’augmenter en 2022.».

« Les gens affluent vers les destinations dotées de plages spacieuses et exotiques: Dubaï, la République Dominicaine, les Maldives… La Thaïlande est à nouveau ouverte aux Belges et est très demandée, il en va de même pour les USA. En Europe, on constate que les destinations méditerranéennes telles que la Grèce et la Croatie ont très bien marché cet été. En 2021, il y a eu peu de citytrips, mais ça reprend doucement. Et les gens optent clairement pour le luxe. Les chambres de catégorie supérieure sont réservées le plus rapidement. »

Celles et ceux qui attendent que le masque buccal disparaisse pour remonter en avion risquent d’être déçu·e·s. « Le masque va rester. En tout cas pour les prochaines années. » Peut-on faire de bonnes affaires en 2022? « Je ne m’attends pas à ce que les prix augmentent beaucoup, mais je ne m’attends pas non plus à ce qu’ils baissent. D’une part, tous les pays veulent attirer les touristes, mais il y a également un grand gouffre financier à combler. C’est dans les pays qui viennent de rouvrir que vous trouverez les meilleurs prix de lancement. »

Olé, télétravail!

D’après le Professeur Kathleen Vangronsvelt, les confinements ont fondamentalement changé l’attitude des employeurs vis-à-vis du télétravail. « Ils ont constaté que le télétravail n’entraînait pas du tout une baisse de la productivité, alors que c’était attendu. De nombreuses entreprises disent qu’elles ne vérifient plus les heures de début et de fin alors qu’elles le faisaient avant la pandémie. Il ne fait aucun doute que le télétravail est là pour rester, même s’il n’est plus obligatoire. »

La crise du Coronavirus a ébranlé non seulement les employeur·euse·s, mais aussi les employé·e·s. « Nous parlons d’un choc de carrière », affirme Vangronsvelt. « Pendant la pandémie, les gens ont commencé à réfléchir plus que jamais à leur carrière. À l’automne 2020, deux fois plus de travailleurs que d’habitude ont indiqué être à la recherche d’un nouvel emploi. En ce moment, un grand nombre de personnes changent de travail. En Amérique, ils appellent cela The Great Resignation (« La grande démission »). Alors, est-ce que 2022 est le bon moment pour changer? « Il y a une pénurie sur le marché du travail, donc les emplois sont nombreux. Nous constatons que les personnes de la vingtaine changent moins, probablement parce que le télétravail est encore très répandu. Il est donc plus compliqué pour eux de se former, étant donné qu’ils n’ont pas encore beaucoup d’expérience en entreprise. C’est peut-être la raison pour laquelle les entreprises sont plus réticentes à embaucher des jeunes avec peu d’expérience.

Pour le recrutement, en revanche, c’est idéal. Beaucoup d’entreprises vont continuer à utiliser la visioconférence pour les entretiens d’embauche. » «Le télétravail est certainement là pour rester, même quand il ne sera plus obligatoire »

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