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Témoignage: ““Ma maman est alcoolique””

Barbara Wesoly
Difficile d'avoir une enfance normale quand votre père ou votre mère abuse de la bouteille. Pauline, 22 ans, a grandi dans une famille ou l'alcoolisme a pris toute la place.

“J'avais 4 ans quand ma mère a commencé à boire. Au début, juste quelques verres. Mais peu à peu, sa consommation d'alcool a dépassé les bornes. Environ deux ans avant que mes parents se séparent – c’était il y a 14 ans – je me suis rendu compte qu’elle buvait beaucoup trop. Elle s’affalait et s’endormait trop souvent dans le divan, et était de plus en plus souvent ivre devant ma petite sœur et moi. S’occuper des tâches ménagères devenait de plus en plus difficile pour elle. Le soir quand elle rentrait du travail, la première chose qu'elle faisait, c’était se servir un verre de pastis. Mais elle ne se contentait pas d’un verre. Avant la fin de la soirée, elle avait vidé les trois quarts de la bouteille, plus deux ou trois bières.

 

Fuir dans sa tête

Quand elle avait trop bu, elle devenait très émotive et même agressive. J’étais une petite fille très calme et j'essayais de l'ignorer autant que possible. Lorsqu’elle faisait une scène, je me réfugiais dans mes livres, dans mon monde imaginaire pour essayer d'échapper à la dure réalité de la vie quotidienne. Dans ses moments de crise, il lui arrivait de casser de la vaisselle et là, j’avais vraiment peur d’elle. Et lorsqu’elle réagissait de façon émotive, je me sentais triste pour elle. C’était constamment des montagnes russes d'émotions.

 

Des mots et des coups

Les jours où maman était sobre étaient des jours de fête pour nous. Elle essayait de nous accorder une attention toute particulière, en faisant une balade à vélo avec nous par exemple, ou en nous proposant une sortie amusante. Nous adorions ces moments-là. Même si, peu de temps après, ils faisaient place à d’autres où elle sombrait de nouveau dans l’alcool. Quand mon demi-frère – le fils aîné de ma mère, né de son premier mariage – a eu 18 ans, il a quitté la maison parce qu'il ne s'entendait pas avec mon père. Une décision que ma mère n’a pas acceptée et qui a aggravé son problème avec la boisson.

Quand elle devenait violente sous l’influence de l’alcool, je ne savais pas quoi faire. Avec moi, cela se limitait généralement à des mots durs. Mais avec ma sœur, elle sortait de ses gonds et ça allait bien plus loin.

 

Des amis pour me protéger

Quand maman et ma sœur se disputaient, j’essayais autant que possible de sortir de la maison pour aller chercher du réconfort auprès de mes amis. Mener une vie normale avec elle devenait chaque jour plus difficile. Ivre, il lui arrivait de fermer la porte d’entrée et de laisser la clé dans la serrure, de sorte que nous ne pouvions plus rentrer à l'intérieur de la maison. Et il lui arrivait aussi régulièrement de sortir du frigo tout ce que nous venions d’acheter et de tout jeter à la poubelle. Parce que pour une raison obscure, elle estimait que nous ne méritions pas de manger.

À la longue, ça a été si loin que ma sœur faisait la lessive et moi, je cuisinais. Sinon, nous n’avions pas de vêtements propres pour aller à l'école et rien à manger le soir.

Au début, nous avons essayé de cacher à l'école ce qui se passait à la maison. Mais nous n’avons pas pu le faire très longtemps. Même si maman ne buvait pas quand elle assistait aux réunions de parents, elle n’a jamais laissé une bonne impression à nos professeurs. Ils s’étaient rendu compte que nous n’étions jamais pressées de rentrer à la maison. Heureusement, j'avais un bon cercle d’amis, qui me protégeaient des méchancetés d'autres enfants. Mais mon travail scolaire s’en ressentait.

 

Toujours des excuses

Elle se trouvait toujours des excuses pour justifier ses abus d'alcool, ça devenait difficile pour nous de garder de bonnes relations avec elle. Quand ce n’était pas son divorce, c’était le départ de mon demi-frère ou le fait que nous devions passer le week-end chez notre père, avec qui nous ne nous entendions pas très bien. Tous les prétextes étaient bons pour se réfugier dans l’alcool. Il y a quelques années, la situation a dégénéré à un tel point qu’elle a fait une overdose d'alcool et de médicaments. Elle a été emmenée à l'hôpital pour y être sevrée. J'ai trouvé temporairement refuge chez des amis et j’ai vraiment espéré que les choses s’améliorent enfin. Mais au bout de trois semaines, elle a quitté l’hôpital de sa propre initiative, et tout a recommencé comme avant. Elle a refusé qu’on l’aide et a menti sur les résolutions qu'elle avait soi-disant prises pour se désintoxiquer.

 

Et si c’était génétique?

Il y a trois ans, après une énième crise, j’ai quitté la maison pour de bon. Une de mes amies est venu me chercher et m'a emmenée dans sa famille. Ma mère était furieuse, aujourd'hui encore elle m’en veut de l’avoir laissée. Ma sœur a elle aussi quitté la maison dès qu’elle a terminé ses études et trouvé un emploi. Aujourd'hui, je bois un verre de temps en temps, mais toujours avec modération. Il m’est arrivé une seule fois d’être ivre, mais ça, je ne le raconte pas! J’ai trop peur de finir comme ma mère.

Je me dis que je pourrais avoir hérité de son caractère et de ses problèmes, et ça me fait  peur. Au point que cela m’empêche de m’engager dans une relation stable et me fait douter de mon envie d'avoir des enfants un jour.

Aujourd'hui, je vis toujours chez mon amie. Tant que ma mère continue à boire, j’essaie de limiter les contacts que j’ai avec elle au strict minimum. Bien sûr, elle me manque parfois. Et je suis terrifiée à l'idée qu'un jour, je reçoive un coup de téléphone m’annonçant qu’il lui est arrivé quelque chose. Mais cela a été trop loin pour que je garde de bonnes relations avec elle. Je travaille à temps partiel, je suis encore aux études et j’espère décrocher mon diplôme le plus vite possible pour avoir mon indépendance. Je trouve aussi un exutoire à mes problèmes dans le Quidditch et je fais tout ce que je peux pour mettre ma vie sur de bons rails. Malgré tout, mon rêve le plus cher est d’être en couple et d’avoir un nid douillet.”

 

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