Chaque été, nous rêvons de plages de sable blanc, de sommets majestueux ou de soirées magiques autour d’un verre de vin avec vue. Mais que se passerait-il si ce rêve devenait votre quotidien? Dans cette série, nous donnons la parole à de jeunes Belges qui ont choisi de reconstruire leur vie ailleurs, pour un temps ou pour toujours.
Julie est une épicurienne créative qui puise son énergie dans les réseaux sociaux, la musique et l’histoire. Attirée par le charme des villages italiens, les paysages vallonnés et la douceur de vivre, elle a décidé en 2023 de s’installer en Ombrie avec son mari.
Un vieux village-château perché sur une colline, un ordinateur portable sur le balcon et l’odeur des oliviers dans l’air: ça ressemble à une image Pinterest, mais pour Julie, 29 ans, c’est un lundi tout à fait ordinaire. Depuis mars 2023, elle vit avec son mari à Campello Alto, en Ombrie, le cœur vert de l’Italie. Elle y travaille comme freelance en gestion de réseaux sociaux, création de contenu et rédaction.
« Ça peut sembler beaucoup, mais tous ces domaines se complètent parfaitement. L’essentiel, c’est que ce soit créatif. Avec mon ordinateur, mon drone, mon téléphone et une bonne connexion Internet, je peux travailler depuis les plus beaux endroits », raconte-t-elle fièrement.
Surchargés
« L’idée de déménager a mûri après la période du coronavirus. Nous étions replongés dans la course effrénée du quotidien, et malgré cette période étrange, rien ne semblait avoir changé. Après des mois passés à la maison, j’ai vraiment pris conscience de combien je m’accordais peu de repos ou de temps – ou plutôt, de combien je ne pouvais pas m’en accorder. J’étais à un tournant: je voulais de toute façon changer de travail. En tant qu’orthophoniste indépendante, je travaillais quasiment 24 heures sur 24, 7 jours sur 7. Pendant les vacances scolaires, je m’accordais des congés ‘par obligation’, car sinon j’allais droit au burn-out. Durant ces semaines de repos, je partais souvent en voyage avec des amies ou avec mon mari. Pas pour prendre des vacances, mais pour fuir littéralement. Une fois sur place, je retrouvais enfin un sentiment de calme, je pouvais de nouveau respirer. Quand j’ai réalisé que mon mari partageait exactement le même ressenti, je lui ai posé la question: ‘Et si on partait vivre à l’étranger, puisqu’on se sent tellement mieux ailleurs?’ Et lui de répondre: ‘D’accord, mais alors ce sera l’Italie.’ Et voilà comment tout a commencé. »
Liberté totale
« Nous avons cherché intensément pendant un an du travail et un logement en Italie », avoue-t-elle. « Au cours de cette recherche, nous sommes tombés sur une offre d’un couple qui cherchait des gérants pour leur grand hébergement de 10 chambres. Nous avons immédiatement répondu, et quelques mois plus tard, nous avons déménagé. Après 2 ans de gestion, nous avons décidé de prendre une autre direction, car nous faisions tout le travail à 2, ce qui était trop lourd. Aujourd’hui, nous travaillons tous les 2 comme indépendants: moi en tant que gestionnaire de réseaux sociaux pour des entreprises belges, et mon mari organise des vacances sportives en gravel bike dans la région (Giro Gravel), un concept unique. Nous avons emménagé dans notre propre appartement et, depuis, nous ressentons un sentiment de liberté ultime. Nous pouvons entièrement décider de notre façon de vivre et de travailler. Cette liberté a pour moi une valeur inestimable. Tant que je respecte mes délais, je détermine mon propre rythme. Ma journée commence généralement par un café doppio sur le balcon, avec vue sur la vallée de l’Ombrie. Ensuite, je travaille sur mon ordinateur portable. Parfois chez moi, parfois dans un petit bar local, ou même en déplacement, avec mon hotspot activé lors d’une excursion. »
Château médiéval
Aujourd’hui, le couple vit dans un charmant petit appartement situé au sommet d’une colline, dans un ancien château médiéval. « Notre village, Campello Alto, ne compte qu’une dizaine d’habitants. Le village entier est perché à 514 mètres d’altitude, au sommet d’une colline entourée d’oliviers et de pins, avec une vue panoramique et phénoménale sur la vallée de Spolète. Mentalement, je me sens beaucoup plus apaisée ici, en Italie », reconnaît Julie. « Je remarque cette différence chaque fois que nous retournons brièvement en Belgique. Chez nous, le contraste social est assez extrême. En Belgique, on essaie de voir un maximum d’amis et de membres de la famille en très peu de temps. C’est toujours une course contre la montre, et malgré ça, il reste difficile de satisfaire tout le monde. Avec le temps, nous avons dû accepter qu’on ne peut pas tout faire. Et qu’on ne peut pas non plus plaire à tout le monde. C’est encore un défi pour moi. Ici, en Italie, notre priorité est surtout le travail. Nous sommes en pleine construction de nos projets personnels, et cela demande beaucoup de temps et d’énergie. Tout début est difficile, tout indépendant vous le dira. Pour l’instant, un revenu stable est la priorité absolue, peu importe où l’on vit dans le monde. La vraie tranquillité ne vient que lorsque l’on dispose aussi d’un espace financier. »

La question financière
Parce que oui, faire un tel choix a aussi un coût.« L’assurance maladie obligatoire, par exemple, s’est révélée plus chère que prévu: la première année, elle est calculée sur la base de ton dernier revenu belge. Nous avons payé environ 2600 € à 2. Après cette première année, elle devient gratuite. Par ailleurs, en tant que nouvel arrivant, tu dois pouvoir prouver que tu es financièrement autonome. Il nous a fallu verser 11.000 € sur un compte bancaire italien, simplement pour démontrer qu’on pouvait vivre un an sans revenu. L’argent est immédiatement accessible, mais tu dois pouvoir le déposer en une seule fois. »
Heureusement, les frais fixes restent raisonnables. « Nous payons 500 € par mois pour notre appartement. Il se trouve au premier étage, avec 2 chambres et un balcon. Lors de la signature du bail, nous avons dû payer nous-mêmes les frais d’agence, ce qui équivalait à un mois de loyer. On a trouvé ça un peu étrange, car en Belgique, c’est souvent le propriétaire qui s’en charge. Nous faisons nos courses une fois par semaine, par pur souci d’efficacité – on n’aime pas trop faire les magasins, et c’est un peu loin. Pour un caddie bien rempli, avec beaucoup de fruits et légumes, on dépense environ 100 €. L’essence coûte à peu près la même chose qu’en Belgique. L’assurance auto s’élève à environ 600 € par an. Pour le Wi-Fi, on paie 20 € par mois, et notre abonnement téléphonique nous revient à 10 €. L’électricité coûte en moyenne 34 € par mois, et notre assurance incendie, 300 € par an. »

Économies
Julie et Jef avaient mis de l’argent de côté pour pouvoir réaliser leur rêve.« Je ne me souviens plus du montant exact, mais c’était plusieurs dizaines de milliers d’euros. Dès l’instant où nous avons su que nous allions déménager en Italie, nous avons vécu aussi simplement que possible. Nous avons aussi tous les 2 continué à travailler aussi longtemps et intensément que possible, jusqu’à la veille du départ. Nous savions qu’il nous faudrait tenir quelques mois sans revenu: nous avons déménagé en mars 2023, et l’hébergement n’ouvrait qu’en mai. Mais nous étions bien informés des frais liés à un tel déménagement. »
Difficultés
La vie en Italie n’est pas toujours aussi romantique qu’on l’imagine.« Si tu penses que la Belgique est compliquée au niveau administratif, c’est que tu n’as pas encore eu affaire à la bureaucratie italienne. Ici, il faut vraiment avoir la volonté de persévérer. Ce qui complique encore plus les choses, c’est que chaque région applique ses propres règles et législations. Et le système est peu numérisé. La patience vaut de l’or ici. Mais au final, chaque problème finit tout de même par trouver sa solution. »
Imprévus
« Le fait que la gestion d’un grand hébergement ne se soit finalement pas révélée être notre job de rêve, nous ne pouvions pas le savoir à l’avance. Mais nous avons beaucoup appris, tant sur le plan professionnel que personnel. On ne peut jamais planifier un déménagement à l’étranger dans les moindres détails. Au final, les choses se passent toujours différemment de ce qu’on avait imaginé. Et c’est justement dans ces imprévus qu’on apprend le plus. »

Bonheur ultime
Julie et Jef en sont certains: c’est leur vie, désormais. « Le plus beau moment jusqu’à présent? Notre mariage à Assise, où nous avons habité nos 2 premières années en Italie. Quand nous sommes sortis de la mairie, toute la place nous a spontanément applaudis. La photo de cet instant, je la chéris, car elle représente notre vie aujourd’hui: spontanée, heureuse et ancrée dans l’instant présent. »
Texte: Dewy De Leeneer
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