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Mes parents ont choisi pour moi

Les mariages arrangés

Les mariages ‘arrangés’ n’existent pas qu’en Turquie ou en Inde, mais aussi en Belgique. Cette tradition ne correspond plus aux attentes de la jeune génération, qui veut aussi aimer pour pouvoir se lier.

Arrangé, forcé, blanc, gris, où est la différence ?

Entre un mariage arrangé et un mariage forcé, la nuance se trouve dans la contrainte. Le mariage arrangé est une tradition culturelle. En général, ce sont les familles qui proposent de lier leurs enfants, mais ceux-ci peuvent donner leur avis et leur consentement est nécessaire. Quand on parle de consentement, il peut s’agir d’un consentement non éclairé, d’une décision qui se prend à la va-vite. On pense notamment aux mariages précipités durant les vacances d’été, sans que les jeunes aient eu le temps de mûrir leur décision. Dans la plupart des pays, l’âge minimum légal pour se marier est fixé à 18 ans, mais il existe des mariages précoces contractés par des mineurs sous la pression familiale. Les raisons sont multiples. Par exemple, une relation amoureuse qu’il faut ‘officialiser’ ou encore un engagement donné entre les deux familles. En Inde, les parents organisent le mariage de leurs enfants pour qu’ils s’unissent au sein de la même caste.

Le mariage forcé se fait sous la contrainte. Les parents imposent leur choix. En plus d’une pression morale et psychologique, il y a parfois privation de droits et violence psychologique, voire physique. On se souvient de Sadia, tuée il y a deux ans à Charleroi, parce qu’elle refusait un mariage forcé au Pakistan.
Il existe également des mariages blancs, ou mariages de complaisance. L’objectif des deux époux n’est pas de construire une relation durable, mais souvent d’obtenir, pour l’un d’eux, des papiers pour pouvoir vivre légalement dans un autre pays. Dans les mariages gris, un des deux époux est sincère et donc trompé sur les intentions de l’autre.

Tülin, 33 ans, maman d’une fille de 15 ans, a vécu un mariage arrangé

“Ma belle-famille m’a enlevé mon bébé, sous prétexte que j’étais trop jeune”

J’avais 14 ans. Je vivais comme toutes les filles de mon âge mes premières amours, sans penser au futur. J’ai rencontré un homme de 22 ans. Je trouvais normal d’avoir des aventures avant le mariage: je suis d’origine turque, mais je suis née en Belgique et j’ai évolué dans la culture occidentale. Un jour, la rumeur de notre relation a éclaté au café turc, lors d’une discussion entre les hommes. Du café, elle est passée à mes cousins, de mes cousins à ma tante, de ma tante à ma mère. Mes parents se sont sentis déshonorés. Leur fille fréquentait un homme sans être mariée! Un déshonneur qui a touché l’ensemble de ma communauté. Tout le monde s’en est mêlé. Ce fut pour moi un cauchemar. Pour ma famille, j’étais coupable et la seule solution était le mariage. Ma première réaction a été de m’inquiéter pour mes études. Je voulais continuer l’école. Une fois cette condition établie, j’ai accepté*. Un an après, je suis tombée enceinte. A 17 ans, je n’étais pas encore une femme que déjà, j’étais maman. Mais ma belle-famille m’a retiré mon bébé et s’en est occupée parce que j’étais ‘trop jeune et encore étudiante’.

Mon quotidien est devenu très pénible entre l’école, mon rôle de belle-fille, et mon enfant chez ma belle-famille. Au bout de quelques mois, j’ai décidé de dire non. Non au rôle qu’on voulait me donner. Non à cette vie où mes rêves n’avaient pas leur place. J’ai tout quitté. Je suis partie me réfugier chez des amis avec pour seul bagage un simple sac. Sans savoir ce qui adviendrait, mais avec la certitude que quelque chose devait changer, que je me sentais mal. C’était comme de mettre le feu au village. Un mois plus tard, la situation calmée, je suis retournée chez mes parents. Je leur ai expliqué que je ne voulais pas de cette vie et que je voulais récupérer mon béb