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FAUT QU’ON PARLE: lettre à nos policiers

Barbara Wesoly

Liège, ce matin du 29 mai. Une fusillade dont on ne connaît pas encore toutes les circonstances. Mais un constat dramatique et irréversible. Trois morts. Un passant et deux policiers. Tués à cause de leur métier.


La mort tragique de la petite Mawda, la tuerie de Liège,... Nos forces de l’ordre se retrouvent ces dernières semaines, au cœur de l’actualité. Impliqués dans des évènements douloureux et choquants, ne laissant personne insensible. Au-delà des questionnements de responsabilités et des polémiques, au-delà du débat politique, demeurent ces vies perdues. Ces absences qui ne pourront être comblées.

Colère, reproches, rancœur, amertume, j’entends autour de moi énormément de critiques sur les policiers, leur travail et leur mentalité. À l’élan de solidarité suscité par les attentats il y a deux ans, a succédé une complexe et déchirante crise des migrants. Les louanges pour le courage et l’héroïsme ont laissé place chez beaucoup de Belges à un sentiment d’autoritarisme et de manque d’humanité. À tort ou à raison, peu importe. Là n’est pas le sujet de cet article. Pas plus que je n’ai l’envie de défendre la Police en tant qu’institution.

Mais aujourd’hui, tout particulièrement, je pense à ces individus derrière la fonction.

Ces hommes et ces femmes qui enfilent leur gilet pare-balles le matin. Ceux qui posent leurs menottes sur la table du hall, comme on y laisserait nos clés.


Et dont les enfants ont déjà joué avec le kepi ou la carte de service. Ceux qu’on a connus en primaire, dont on a été copains au lycée ou qu’on a croisé sur les bancs de l’unif. Ceux avec qui on trinque encore en soirée. Ou dont parfois on partage même un bout de la vie. Ceux qui ne sont séparés de nous que par un choix professionnel.

Ceux qui, surtout, rentrent le soir du boulot, en ayant vécu des évènements qui nous demeurent inimaginables. Et dont le quotidien nous est souvent incompréhensible tant il est à mille lieues du nôtre.

Parce qu’à force de dire que deux policiers ont été tués, que deux policiers ont tiré sur une voiture dans laquelle il y avait un enfant, on oublie les humains qui enfilent l’uniforme.


On oublie que un + un ne fait qu’une somme de deux individus distincts. Et pas un mouvement de pensée ou d’action. On généralise, grisés par la simplicité qu’il y a à envisager l’existence en bichromie. Du noir, du blanc. Des gentils, des méchants.

Les policiers impliqués dans le décès de la petite Mawda ne sont pas les mêmes que ceux qui sont morts aujourd’hui. Mais ils ont un point commun. Celui de posséder  des pouvoirs et devoirs que nous n’aurons jamais. Et certainement pour notre plus grande chance tant ils sont lourds à porter. Celui de tenir une arme et de choisir ou pas de s’en servir. Celui d’être des cibles permanentes. Celui d’intervenir.

Mais qui, malgré les injures et les blâmes, les railleries et les crachats, décrochent toujours lorsque l’on appelle le 101.

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