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FAUT QU’ON PARLE: quand devient-on vraiment adulte?

Justine Rossius

Petites, on s’imagine naïvement que le statut “adulte” arrivera naturellement. Un jour, on se réveille et on est adulte. Sauf qu’en vrai, ça se passe rarement comme ça.


 

Ado, j’imaginais l’âge adulte comme un cap concret. Pour moi, dans la vie, il y avait la première fois que tu peux regarder un film interdit aux moins de 13  ans – genre Titanic – , la première fois que tu peux acheter des clopes sans voler la carte d’identité de ta grande sœur et bam, la première fois où tu deviens adulte. C’était clair: je serai adulte quand j’aurai acheté un appart’, quand j’aurai atteint les 30 ans et que je recevrai des fiches de paie à mon nom (plus il a a de zéros dessus, plus tu es adulte).

 

Puis un jour, j’ai soufflé mes 27 bougies, j’ai reçu ma déclaration d’impôt, j’ai trouvé un comptable, j’ai acheté un appartement, j’ai souscrit à toutes sortes d’assurances. Et alors, j’ai attendu que la grâce de l’âge adulte prenne possession de moi. Un peu comme un train de la SNCB, ce moment ne s’est pas pointé ou peut-être l’ai-je raté. Disons que j’ai plutôt eu l’impression de rester dans la voiture jaune de Oui-oui. Et encore: Oui-Oui, lui, au moins, n’a pas peur de changer un pneu. Alors comment expliquer qu’à quelques mois des 30 ans, on puisse toujours appeler sa maman au moindre bobo? Comment expliquer qu’on ne puisse pas se sentir parfaitement légitime devant un adulte, un vrai, ceux aux rides caverneuses, celles aux ongles manucurés 7 jours sur 7? Comment expliquer qu’on adore toujours passer des journées devant “Friends”, en mangeant des Haribo et des mac & cheese?

 

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Pourtant, je reçois bien quelques signes m’indiquant que je suis sur la bonne voie: l’apparition d’une ride par-ci, d’un cheveux blanc par là, l’envie soudaine de lire Françoise Sagan un samedi soir plutôt que d’affoner des Tequila, l’achat d’un bouquet de jonquilles plutôt qu’une robe & Other Stories… Clairement, il se passe des choses qui m’éloignent petit à petit de l’ado que j’étais, mais quels sont les critères qui marquent l’entrée dans l’âge adulte? Y en a-t-il seulement ou sommes-nous tous destinés à rester des éternels enfants?

 

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Rassurons-nous, comme lu par ici:

Cet état des lieux est semble-t-il générationnel. Selon plusieurs études sociologiques, les natifs des années 80 ont formé la génération kidult – néologisme anglophone né de la contraction de kid et d’adult.


Interrogé par Psychologie, Pierre Henri Tavoillot, philosophe et professeur à la Sorbonne, explique cette difficulté à passer à l’âge adulte, par la difficulté d’être adulte à notre époque: ” L’entrée dans l’âge adulte est plus tardive, la vie adulte plus incertaine – en raison de l’instabilité conjugale et du chômage –, tandis que l’ambition de réalisation personnelle est plus forte que jamais. Il en résulte un cocktail détonnant, qui fait que l’inquiétude, sinon la crise, est permanente.”

 

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Un cocktail détonnant, c’est aussi ça sûrement, le passage à l’âge adulte: un bonne dose de confiance en soi, qui ne peut subvenir que de l’expérience, des réussites, surtout des échecs. Un zeste de mauvais choix et d’erreurs, de sauts dans le vide, tantôt dans des piscines sans eau, tantôt dans des mers turquoises. Un soupçon de désillusions, pour comprendre que le monde ne ressemble par à un épisode de Newport Beach, où tout le monde s’aime et est bronzé (Seth Cohen n’existe pas, les filles…). Une réconciliation aussi, avec une vie moins Bisounours et des parents plus humains que prévus (Goethe disait: “Être adulte, c’est avoir pardonné à ses parents”). Devenir adulte, c’est aussi se réconcilier avec nous-même et nos choix “pourris”, qui ne le seront jamais pour la simple raison qu’ils sont les nôtres. C’est accueillir notre instinct, lui faire confiance, même s’il ne nous indique pas toujours le chemin le plus moral. Devenir adulte, c’est faire un deuil, pour faire naître une version plus sereine de soi-même, même si elle mange toujours des Haribo devant un épisode de “Friends”.

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