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Flair Book Club: ““Les choses humaines””, le roman qui questionne la notion de consentement

Justine Rossius

Dans “Les choses humaines”, roman primé du prix Goncourt des Lycéens, Karine Tuil revient sur des sujets sociétaux bouillants à l’ère post #MeToo : la gestion du viol par la justice et la notion de consentement. Un livre hautement psychologique qui se savoure, mais se dévore.

 

Le résumé


Karine Tuil nous plonge dans le quotidien de plusieurs personnages de la famille Farel : famille parisienne dont le père est présentateur politique sur une grande chaîne, tandis que la mère est essayiste féministe. Le fils, Alexandre, semble parfait sous tout rapport : il est ingénieur diplômé de la prestigieuse Polytechnique et est sur le point d’intégrer l’Université de Standford, aux États-Unis, lorsque le scandale éclate : il est accusé d’avoir violé Mila, la fille du nouveau compagnon de sa mère. Selon Alexandre, elle était consentante et il ne l’a donc pas violée. S’en suivra une bataille judiciaire absolument haletante.

Pourquoi on a aimé ?


L’auteure ose aborder le sujet épineux du consentement et de cette fameuse « zone grise » qui brouille souvent les décisions de la justice. Une zone d’ombre qui se trouve au cœur de nombreux débats depuis notamment l’affaire Weinstein et qui mérite d’être questionnée. C’est pile cette réflexion que suscite ce roman, dont vous aurez envie de débattre des heures durant suite à sa lecture (c’est en tous cas ce qu’on vous souhaite). Où se situe le consentement et où commence le harcèlement ? Au fil des pages, l’auteure ne prend jamais parti, alternant les perspectives et les points de vue pour dévoiler toute la complexité du propos. Car oui, le viol reste un sujet complexe vis-à-vis de la justice et on a particulièrement aimé qu’un roman nous le rappelle. Dans la rue, sur les réseaux sociaux, la notion de consentement devient de plus en plus limpide (et c’est une victoire). Mais la loi manque encore parfois de clairvoyance à ce propos, ce qui explique que si peu de victimes de viol osent porter plainte. Comme le rappelle Amnesty International Belgique, seules 10% des victimes de viol environ se rendent à la police pour dénoncer leur agression. En cause notamment : la conscience de la difficulté et de la lourdeur du processus judiciaire et du nombre très faible de condamnations effectives. À juste titre, puisque 53% des affaires de viols sont classées sans suite et sur les affaires poursuivies, très peu d’auteurs sont condamnés à une peine de prison effective.


Seul bémol au roman, à nos yeux: la version de celle qui affirme avoir été violée manque au récit. Une façon, pour l’auteure, de trancher à la place de la justice ? Ou simplement une métaphore de la mise sous silence des victimes de viol dans une société qui peine encore à comprendre que ne pas dire non n’égale pas consentir. « Les choses humaines », ce sont des pages à jeter sur votre petit feu intérieur pour l’enflammer, pour peu que ces questions vous intéressent. Le procès constitue clairement la meilleure partie du livre. Juriste de formation, Tuil nous laisse à lire des plaidoiries incroyablement prenantes, bien ficelées et renversantes, mettant en avant les contradictions et ambivalences des différents personnages. On se retrouve scotché·e·s aux mots des avocats des pages durant.

Et en 3 mots-clés ?


#MeToo

#Enquête

#Consentement

À qui ça va plaire ?


À celleux passionné·es de justice et d’enquête. À celleux que la notion de consentement intrigue, qui souhaitent creuser le sujet et nourrir leur cerveau de nouvelles perspectives.


Les choses humaines de Karine Tuil, Collection Blanche, Editions Gallimard, 2019


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