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On a vu ““Chanson douce””, l’adaptation au ciné du best-seller de Leïla Slimani

Le prix Goncourt de Leïla Slimani (2016) nous avait laissé un sentiment de malaise absolu. Même après avoir refermé l’ouvrage, cette chanson, davantage horrifique que douce, nous trottait encore dans la tête. Lucie Borleteau a réussi à retranscrire ce sentiment de panique dans un long-métrage, adapté du best-seller, qui sort en salles ce mercredi 27 novembre et que nous avons pu voir en avant-première.


Si on écoute attentivement les paroles de la chanson d’Henri Salvador, cette berceuse, qu’on chante aux enfants depuis des décennies, n’a jamais été vraiment douce. Elle apprend aux tout-petits à rester aux abois car un loup rôde dans le bois.

Le loup, dans le roman de Leïla Slimani, c’est Louise (Karin Viard), la nounou de Mila, 5 ans, et Adam, 11 mois. Myriam (Leïla Bekhti), leur maman, est épuisée, lasse de passer ses journées dans les couches et les biberons. Elle rêve de reprendre son travail d’avocate, n’en déplaise à ceux qui pensent qu’une mère ne peut pas et, s’occuper de ses marmots, et s’épanouir professionnellement. Le débat autour d’un sujet, encore tabou aujourd’hui, est lancé. Car, au-delà du thriller inquiétant, cette “Chanson douce” est aussi la chronique sociale (tout aussi inquiétante?) de notre époque.

Tous les clichés de la société passés en revue...


En attendant d’obtenir une place dans une crèche (encore un thème qui fait mouche) pour leur petit dernier, Myriam et Paul, le papa, décident donc d’engager une nounou. Mais, les entretiens pour trouver la personne à qui ils oseront confier la prunelle de leurs yeux semblent interminables: il y a la nana qui ne parle pas un mot de français, celle qui rouspète à propos de ses horaires, celle qui s’entiche déjà du mari. Tous les clichés sont passés en revue.

Et, quand Louise se présente sur le pas de leur porte, Myriam et Paul réalisent qu’ils viennent de trouver la perle rare. Louise est parfaite. Du moins, à première vue. Elle arrive plus tôt, repart plus tard, cuisine pour tout le monde, et sauve, par la même occasion, un couple qui battait de l’aile. Myriam et Paul se remettent à faire l’amour, sortent jusqu’à pas d’heure avec leurs copains, boivent, fument, se passionnent à nouveau pour leurs métiers respectifs. Grâce à Louise, ils reprennent goût à la vie et se définissent, à nouveau, en dehors de leurs enfants. Ils pensent à eux. Et c’est tellement bon qu’ils sont prêts à fermer les yeux sur les principes d’éducation de Louise, pourtant souvent à l’opposé des leurs.

De Louise, on sait si peu de choses


Myriam lui est tellement reconnaissante qu’elle la laisse entrer dans son intimité, l’emmène dans ses bagages quand ils partent en vacances en famille. L’affect remplace tout doucement le lien de subordination. Myriam n’arrive plus à poser ses limites et tente d’arrondir les angles quand Paul se met à s’inquiéter, trop tard, de la santé mentale de leur gardienne. Car, de Louise, le couple, comme le téléspectateur, ne sait que peu de choses. Si ce n’est qu’elle habite dans un appartement glauque et froid, à l’opposé du cocon familial chaleureux et empli d’amour où elle retrouve chaque jour Mila et Adam.

Les différences avec le roman (attention, spoiler)


Si, dans son roman, Leïla Slimani lève davantage le coin du voile sur les blessures de Louise, Lucie Borleteau laisse planer une zone d’ombre autour du personnage, ce qui la rend encore plus difficile à cerner. Surtout que, n’en déplaise aux puristes, l’issue insoutenable de l’histoire n’est révélée dans le long-métrage qu’à la toute fin. Alors que Leïla Slimani avait préféré, dès le départ, mettre le lecteur dans la confidence de ce qui allait suivre. Ici, le téléspectateur est maintenu en tension pendant 1h40. Le jeu de Karin Viard est exceptionnel. Chacune des mimiques et des grimaces de l’actrice souligne l’excentricité et la complexité du personnage. Leïla Bekhti est, elle aussi, remarquable dans son rôle de mère spectatrice qui, assiste presque sans rien dire, à l’assemblage d’un puzzle dont la fatalité sera inexorable.

Faut-il aller le voir au ciné?


Oui. Le livre de Leïla Slimani, qui s’inspire d’un fait-divers ayant réellement eu lieu à New York en 2012, nous avait bousculées. Et, contre toute attente, cette adaptation cinématographique a réitéré l’exploit en nous emmenant progressivement vers l’irréparable jusqu’à nous glacer le sang.

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“Chanson douce”, par Lucie Borleteau, en salles le 27 novembre.

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