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Témoignage: ““Je m’occupe de mon père malade””

Barbara Wesoly
Ils prennent soin de vous tout au long de votre enfance et jusqu'à l'âge adulte. Mais il arrive que la situation soit inversée et que ce soit vous qui veillez sur eux. C'est le cas de Soumaya, 30 ans, qui a pris son père malade à la maison.

"Il y a 12 ans, mon père a été admis à l'hôpital pour une hémorragie digestive, et sa santé a commencé à décliner. Marcher lui est devenu de plus en plus difficile et sa mémoire à court terme lui faisait de plus en plus défaut. Les premières années, les médecins ne trouvaient pas de quoi il souffrait précisément. Jusqu'à ce qu'il y a 8 ans, on lui diagnostique le syndrome de Korsakov, un trouble neurologique qui affecte le cerveau. Un coup dur, qui a également eu des conséquences lourdes pour ma mère, car mon père était de plus en plus dépendant d'elle. Maman n'en pouvait plus. L'an dernier, elle a décidé de tirer un trait sur leur mariage. Du jour au lendemain, mon père s'est retrouvé tout seul.

 

Une décision évidente

Dans son état, rester seul était impossible. Les deux premières semaines, il a été hospitalisé en psychiatrie, mais il ne voulait absolument pas y rester. Ensuite, il a pu retourner un temps chez sa mère, déjà âgée, mais lorsqu'elle-même s'est retrouvée à l'hôpital, il a fallu trouver une autre solution. Pendant une très courte période, mon père a pu rester encore un peu dans la maison de ma grand-mère, mais après s'être fracturé la jambe et avoir dû subir une opération pour ses artères bouchées, il a eu besoin d'une aide supplémentaire. En tant que fille, je me sentais moralement obligée de prendre mon père malade chez moi, même s'il n'y a qu'une chambre et que c'est très difficile à combiner avec mon job à temps plein.

 

Avec des hauts et des bas

Cela fait deux mois que mon père vit avec moi, et ça se passe chaque jour un peu mieux. Il n'est pas toujours le patient le plus facile. De temps en temps, ses problèmes d'alcool lui jouent des tours, ou bien il se bat contre ses  troubles alimentaires. Et le manque d'espace contribue forcément à créer des tensions entre nous. Mais on essaye de faire de notre mieux, avec des hauts et des bas. Il peut encore se laver et s'habiller seul, mais sa mémoire lui fait régulièrement défaut, de sorte qu'il ne se rappelle plus quand il doit prendre ses médicaments ou à quelle heure arrive l'aide soignante à domicile.

Prendre soin de mon père tout en travaillant et en m'occupant de la maison n'est pas simple. Moralement aussi, c'est très dur de voir son père décliner alors qu'il n'a même pas 60 ans.

La prise en charge de mon père demande aussi un certain nombre de sacrifices. Ainsi, je suis toujours contrainte de reporter mes vacances et je me dépêche de rentrer à la maison au plus vite après le boulot.Tout le monde ne le comprend pas. Je me heurte malheureusement parfois à de l'incompréhension quand je fais remarquer que c'est dur pour moi. 'C'est toi qui l'as choisi!', me répond-on souvent. Heureusement, il y a aussi des gens qui témoignent du respect pour les efforts que je fais pour mon père.

 

Rien de plus normal

Mon père et moi passons aussi de beaux moments. Maintenant, nous mangeons tous les soirs ensemble et allons parfois faire les courses à deux.

Mes parents se sont toujours merveilleusement bien occupés de moi, je trouve donc cela normal que les rôles soient à présent inversés et de m'occuper de mon père maintenant qu'il a besoin d'aide.

J'ai un amoureux, mais envisager d'habiter ensemble n'est pas à l'ordre du jour. Je pense bien sûr à l'avenir. Je réalise que je vais devoir prendre soin de mon père jusqu'à la fin de ses jours. Mais, tout comme les autres jeunes femmes, je rêve aussi de me marier et fonder une famille.C'est pour cela que nous cherchons un petit appartement pour mon père, tout près de chez moi. Son propre toit, où il aura droit à une aide familiale et une infirmière à domicile, et où il pourra vivre en toute indépendance aussi longtemps qu'il le pourra."

 

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