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Témoignage: ““Je ne pourrai jamais devenir maman””

Barbara Wesoly
Des rires d'enfants et des petits bouts courant partout... Fonder une famille était le rêve d'Isabelle, 35 ans. Mais, après un parcours médical éprouvant, son mari et elle ont décidé de renoncer à tout espoir de devenir parents.

"'Et maintenant, passons au plan B', me suis-je dit. Mais je n'avais pas de plan B, pas de solution de secours. Lorsque, après des années de vaines tentatives, mon homme et moi avons décidé de tout stopper, de ne plus chercher à avoir d'enfants, je n'ai pas su quoi faire. Depuis toute jeune, j'avais une certitude: celle de vouloir être maman. Cela avait même été l'un des premiers sujets abordés avec mon mari. Nous étions certains de vouloir fonder une famille ensemble. La seule interrogation concernait le nombre de bébés. En achetant notre maison, nous avions prévu suffisamment de place pour accueillir notre future tribu. Mais la vie ne se déroule pas toujours de la façon dont on l'imaginait. On peut faire de son mieux pour accepter les imprévus et les déceptions, mais c'est différent en ce qui concerne un enfant.

 

Sujet tabou

Les gens ne le comprennent pas toujours. Combien de fois n'ai-je pas entendu 'Les médecins peuvent faire des miracles, tout va s'arranger'. Non, cela ne finit pas toujours bien. Pendant des années, j'ai ressenti une telle culpabilité, une telle honte face à notre échec. J'avais l'impression que nous étions les seuls à ne pas pouvoir devenir parents. Aujourd'hui, je sais que j'avais tort et que c'est simplement une chose que les gens préfèrent taire. 'Prenez des vacances!', c'est le genre de réponse que nous avons entendue lorsque nous nous sommes confiés sur nos difficultés. Quel cliché! Même s'ils se voulaient bien intentionnés, ces commentaires étaient blessants. C'est très dur lorsque l'on n'est pas armé pour affronter tout ça.

 

Temps perdu

Quand on s'engage dans un processus de procréation médicalement assistée, on ne s'imagine pas ce que ça représente. Physiquement, il vous faut supporter des traitements hormonaux lourds, mais moralement, c'est encore plus éprouvant. Se nourrir d'espoir à chaque tentative, pour ensuite vivre une déception, à chaque fois plus grande. La décision de tout arrêter ne s'est pas prise en un jour. Elle s'est imposée au moment où mon homme et moi, nous nous sommes dit que nous n'en pouvions plus.

Nous étions à bout. Les résultats n'étaient pas bons et nous ne parvenions plus à y croire. À chaque essai, nous avions l'impression de perdre une part de nous-mêmes.

Nous ne voulions pas que ça devienne une obsession et en sortir brisés. Nous voulions reprendre le contrôle de nos existences, après toutes ces années d'un quotidien rythmé uniquement par le planning éreintant des injections, des visites à l'hôpital, des implantations et de l'attente.

 

Accepter progressivement

D'une certaine manière, cette décision nous a soulagés, même si elle n'a en rien diminué notre douleur. Elle m'a plongée dans le désarroi. Car ce n'est pas seulement à son bébé que l'on renonce, mais aussi à une vision du futur. Tout ce temps à se dire que l'on veut deux enfants, et qu'au pire si ça ne marche pas, un seul, ce sera très bien aussi... Pour ensuite devoir réaliser et admettre que ça n'arrivera jamais. Vous passez alors par toutes les étapes d'un deuil, du déni à la colère, puis à l'acceptation. J'ai alors réalisé qu'il me fallait donner un autre sens à ma vie.

 

Mon plan B

Je m'étais toujours épanouie dans mes précédents emplois, en tant que consultante et chef de projet, mais soudain, je ne me sentais plus bien. Qu'est ce qui pouvait me rendre vraiment heureuse? Comment donner un sens à ma vie sans enfants? Très vite j'ai compris que je désirais aider les autres. Plutôt paradoxal, pour quelqu'un qui vient du monde impitoyable des affaires. Mais pour avoir vécu cette expérience, je savais à quel point obtenir du soutien et des conseils peut s'avérer précieux lorsqu'on traverse un parcours du combattant pour avoir des enfants. Je n'ai rien à reprocher aux excellents soins que nous avons en Belgique. Et il existe des services d'aide psychologique, j'ai d'ailleurs été moi-même en consulter et je me sentais mieux après chaque séance. Mais les listes d'attente sont longues et c'est parfois laborieux d'obtenir un rendez-vous avec un professionnel.

 

Aider les autres

J'avais pourtant tellement besoin de pouvoir m'exprimer dans un espace de confiance et dans une atmosphère bienveillante. Je voulais donc aider d'autres personnes vivant une situation similaire à la nôtre. Leur montrer qu'ils ne sont pas seuls et qu'ils peuvent et doivent même en parler.Je commence prochainement mon activité et j'ai choisi de la pratiquer dans notre maison, pour que ceux venant consulter se sentent en confiance et à l'aise. J'ai la conviction que mon vécu et mon combat pour avoir un enfant, ainsi que mon expérience en tant que coach dans les affaires, peuvent faire la différence. Mes premiers rendez-vous se dérouleront dans quelques semaines.

 

Profiter des petites choses

Heureusement, mon mari et moi avons toujours beaucoup dialogué. On peut facilement perdre son couple de vue lorsque l'on est obsédés par son désir d'enfants. Nous avons progressivement pris conscience que nous devrions nous réjouir de chaque petit bonheur que la vie nous offre. Nous faire des trips à vélo, des balades lorsque le soleil brille, partager des moments ensemble le week-end.

Nous ne serons que nous deux, alors autant en profiter. Peut-être restera-t-il toujours inconsciemment l'espoir d'un miracle, mais ce serait insensé d'y croire. Alors j'avance, pour ne pas souffrir encore plus.

Je mentirais si j'affirmais que j'ai dépassé tout ça. Et je ne suis pas naïve, je sais que le chagrin ne disparaîtra sans doute jamais totalement. Mais je le sens diminuer. Je sais qu'en tant que 'coach en désir d'enfant', je pourrai contribuer à aider d'autres personnes. Un choix que je fais avec tout mon cœur. Mes proches sont convaincus que j'ai pris la bonne décision. Je souris spontanément rien qu'à penser à mon emploi et aux couples que je vais pouvoir accompagner. Désormais, je sais ce que je veux faire pour le restant de ma vie."

 

maman

 

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