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Témoignage: ““J’ai perdu le job de mes rêves””

Barbara Wesoly
Eve, 35 ans, était make-up artiste pour une marque mondialement célèbre de maquillage. Un emploi qu'elle s'était battue pour obtenir pendant des années et qu'elle a dut quitter à cause d'un burn-out.

"Être make-up artist, ce n’était pas mon rêve de petite fille. Je voulais devenir coiffeuse. Mais lorsque ma carrière s’est brutalement arrêtée à cause d’une allergie aux produits capillaires, j’ai dû trouver autre chose. J'ai alors entendu parler des cours de body painting. J’y ai pris goût immédiatement et j’ai suivi différentes autres formations: maquillage visage, création de plaies en 3D, et même un cours intensif à Paris. Je recevais des commandes continuellement et à la longue, je me suis retrouvée à travailler sept jours sur sept. J’ai commencé à enseigner, et trouvé un job à temps partiel dans un magasin de maquillege et à côté de ça, je travaillais comme make-up artist freelance. Puis, une place s’est libérée chez M.A.C.: make-up artist senior pour le Benelux. Un job de rêve pour moi, car il me permettrait de voyager dans le monde tout en vivant de ma passion. Et je l’ai décroché.

 

Le tour du monde pour le job de mes rêves

"Avant mes 40 ans, je veux participer à la Fashion Week", avais-je toujours dit. C’était mon rêve ultime. Moins d’une semaine après mon entrée dans ma nouvelle fonction, c’était déjà fait et je n’avais encore que 29 ans. Gé-nial! Aujourd’hui encore, je repense avec bonheur à cette semaine à Milan. Cette ambiance, ces vibrations, ce boulot, c’était tout ce dont j’avais toujours rêvé. Je me souviens encore par cœur du look que nous avons créé: chaque mannequin était maquillée avec du rouge à lèvres vif. Le reste du job me plaisait aussi à 100 %.

Je parcourais le monde pour des réunions, je donnais des ateliers et je formais d’autres make-up artists. Je passais moins d’une semaine par mois à la maison. Et les semaines où j’étais là, je partais souvent à Amsterdam.

On ne peut pas véritablement appeler ça "être à la maison", car parfois je passais six heures en voiture, pour encore embrayer sur une journée de huit heures. Même en Belgique, je courais d’un coin à l’autre. Notre société était en plein essor et je le remarquais bien. Après trois ans, j’ai tiré la sonnette d’alarme: j’ai demandé si quelqu’un pouvait être recruté pour prendre en charge les Pays-Bas. Mais M.A.C. préférait me garder à ce poste. Je l’ai pris comme un compliment.

 

Pas de temps pour l’hôpital

Crevée. Morte crevée. C’est ainsi que je me sentais les derniers mois. Mais les Fashion Weeks de New York et de Paris approchaient à grands pas, et je ne pouvais pas tomber malade. Mon médecin m’a fait une prise de sang pour voir ce qui n’allait pas. Le soir-même, à 23 h 30, il m’a appelée. Les résultats étaient très mauvais, il voulait me faire hospitaliser. "Ça na va pas, ai-je répondu, j’ai bien trop de boulot." On m’a administré trois baxters de fer pour me requinquer. En faisant des courtes siestes et en prenant des cachets carabinés contre ma gastrite qui ne passait pas, je me suis traînée aux Fashion Weeks. Parfois, je ne pouvais même plus tenir debout à cause de la douleur, mais j’étais sévère avec moi-même. "Tiens bon, Ève. Encore un peu et les vacances sont là". Pas étonnant que j’arrive encore à peine à marcher lorsque ces vacances sont enfin arrivées.

 

Je me sentais nulle

Finalement, je suis restée un an à la maison. Mais même si je restais assise toute la journée et que je tenais à peine sur mes jambes, je refusais d’admettre que j’étais malade. J’étais tout simplement fatiguée. Ce n’est que bien plus tard que je me suis rendu compte que j’étais en burn-out.

Je n’arrivais même plus à lire un bouquin, car je ne pouvais pas me concentrer. Un verre d’alcool suffisait pour me mettre en panique et un seul café faisait trembler mes jambes. Je me sentais nulle.

 

J’avais envie de me battre, d’être plus forte, mais c’est impossible quand on est en burn-out. Je devais me reposer, me reposer, me reposer. Avec l’aide d’un thérapeute et d’un médecin, j’ai fait un travail sur moi-même. Mon perfectionnisme légendaire et ma manie de toujours vouloir montrer de quoi je suis capable ont causé ma perte. Depuis lors, je vis davantage pour moi-même. Je me repose quand le besoin s’en fait ressentir, je travaille beaucoup moins et je prends le temps pour moi et pour faire des choses agréables. J’ai écrit un bouquin sur mon expérience, cherché un nouveau job et travaillé sur moi-même. Je n’ai plus besoin d’être parfaite en permanence, de temps en temps, un peu de légèreté me fait du bien. Et cela devrait être le cas pour tout le monde. Car rien ne mérite qu’on tombe aussi bas."

 

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